Ce texte aurait pu être frappé du sceau « Interdit aux moins de 18 ans ».
Les moins de 18 ans, aujourd’hui, ne sont plus tombés de la dernière pluie, il pourraient nous donner des leçons en matière de mœurs peu avouables.
Etre interne au lycée était une occasion rêvée pour apprendre à grandir.
Les plus timides, parfois se déluraient au contact des autres, bien plus rapidement qu’en restant au foyer familial.
Certains pouvaient aussi s’enfermer davantage dans leur timidité en devenant souffre douleur.
Pas de quoi étonner un monde, c’est la vie ordinaire.
Il se passait toujours quelque chose dans ce milieu clos. Nous avions des profs de qualité, nombreux furent ceux de ma promotion à poursuivre bon chemin. Des médecins, généralistes ou spécialistes, des dentistes, des profs, bref ce fut le cas pour bon nombre de ceux de mon âge. Les autres suivirent d’autres chemins tout aussi passionnants.
Dans la cour, comme au réfectoire c’était un autre monde et au dortoir aussi.
Je me souviens d’un gars solide et sportif arrivé du continent qui en imposait par son physique mais pas de quoi impressionner les copains. Les p’tits malins avaient très rapidement détecté la faille, le bougre était naïf. On pouvait le mener par le bout du nez.
Les plus facétieux l’avait embrigadé, vantant ses capacités physiques, pour mettre de l’ordre dans quelques échauffourées qui pouvaient s’allumer incidemment.
Ils l’embauchèrent pour rétablir l’ordre le cas échéant.
Ils organisaient une fausse bagarre dans un coin de la cour et l’appelaient en renfort pour rétablir le calme. Il était envoyé sur place en urgence, se jetait dans la mêlée, n’écoutant que son courage, que l’on avait bien chauffé, pour séparer les antagonistes. Tous les autres faisant mine d’intervenir aussi, tapait à l’aveuglette, fausse aveuglette, en tombant à bras raccourcis sur le gardien de la paix qui en prenait plein la tête. Ce dernier se retirait en se protégeant le crâne et se plaignant d’avoir essuyé trop de coups y compris quelques châtaignes.
Chacun s’excusait en prétextant qu’il n’avait pas vu que c’était lui qui prenait.
On le cajolait, lui frictionnait le cuir chevelu en lui promettant d’être plus attentifs la prochaine fois.
Vous l’avez deviné, deux jours plus tard, une nouvelle vraie fausse bagarre était inventée dans un autre coin de la cour à l’écart des regards, et le pauvre vigile qui intervenait toujours le premier en prenait encore pour son grade. Certains criaient pour tempérer les frappeurs en faisant semblant de le protéger sous la douche.
Une séance de palabres s’en suivait pour expliquer qu’il ne fallait pas s’affoler sous peine de rater sa cible et faire n’importe quoi. Ils prenaient la défense du candide au cœur tendre.
Notre ami, après avoir essuyé quelques raclées non méritées, fort mécontent de prendre tant de coups, décida de se retirer des affaires, troubles et compliquées, qui éclataient sans prévenir.
Ce n’est pas très reluisant mais ce sont choses de la vie.
Il s’en passa des belles aussi, qui se racontent en chuchotant, et en privé, pour ne point froisser les chastes oreilles.
Dans un internat, bien des choses non avouables peuvent naître d’une idée saugrenue.
En voilà une qui germa dans l’esprit oisif de certains, en quête d’idées nouvelles les jours de gala.
Ils avaient décidé de faire un concours d’oiseaux en tous genres, le soir au dortoir avant le coucher.
Le thème était « Qui a le plus beau bruant zizi ? » (Image en titre)
Une table particulière était placée dans la salle de toilette. Elle était en tôle usagée vous allez comprendre pourquoi.
Les inscriptions faites, il fallait se présenter en pyjama devant le jury, sortir son p’tit oiseau qui était jaugé à vue d’œil, en longueur et grosseur avant de noter, puis frapper un grand coup sur la table pour juger le son produit, lourd, moyen ou faible.
Tout se passa normalement jusqu’au tour d’un certain JP, impatient de se présenter… tout le monde compris très vite pourquoi.
Il présentait, de très loin, le plus grand passereau du concours et le bruit qu’il produisit en frappant sur la table ne laissa aucun doute sur la lourdeur du choucas. Tout le monde comprit qu’il était inutile de poursuivre l’exhibition.
Si un autre oiseau se présentait mieux emplumé, c’eut été monstrueux.
Ceux qui devaient défiler après lui, rengainèrent leur bruant, chardonneret ou rouge-gorge, n’étant même plus certains de participer au prochain concours.
Quant à ceux qui étaient déjà passés, fort marris, s’en allèrent la queue basse.
Il y eu moult palabres pour savoir, si on devait exclure le choucas de la prochaine épreuve pour ne point décourager tous les autres.
C’était très injuste, personne n’a songé à ranger le corvidé dans la volière du jury qui ne participait pas à la compétition.
J’ignore s’il y eut une suite à cette première monstration d’oiseaux que l’on devait présenter en toute humilité et calme, car au moindre chant orgueilleux, à jouer au phénix champion des hôtes du dortoir n’était pas toléré, c’était l’exclusion immédiate !
Je ne sais pas vous, peut-être avez-vous été offusqué par cette lecture, qu’est-ce que j’ai ri pendant l’écriture.
J’ai eu bien du mal à terminer cette rédaction tant j’étais secoué par les fous rires.
Il y a prescription, il fallait bien qu’un jour cela se susse ! (Ce sera mon seul écart du jour 😉 )
C’est vous dire si je m’amuse ! Faut-il encore vous en convaincre !
Allez, il n’y a pas de quoi fouetter un chat ! Souriez, c’était jour gratuit.
Tout peut être dit lorsque c’est fait avec autant de grâce et d’humour 🙂
Sorti du bac à sable vous peinerez à trouver de chastes oreilles, j’en ai bien peur.
Bravo pour cette somptueuse collection d’oiseaux de toutes les tailles et de toutes les couleurs 😉
Merci Al.
j’y ai mis tout mon humour pour ne point choquer, je viens de le relire, qu’est-ce que j’ai ri, encore une fois.
Je me fabrique un théâtre permanent pour ne jamais sombrer dans la morosité…
Et lorsque mes textes paraissent tristes ou nostalgiques, ce n’est que recherche de contrastes pour mieux aimer la vie 😉
Bonne soirée.
J’ai bien rigolé ! Quelle verge ! Enfin je veux dire quelle verve !
Pas simple de rire en se moment, dans l’état actuel des choses.
Merci pour cet article !
J’ai hésité pourtant !
Merci Bonne soirée.
Savoureux ! 😀
Merci Chat… 🙂
Absente 3 jours j’ai « pédalé » pour toutes les lectures en retard… Bonne journée.
C’est gentil de votre part, c’est un encouragement à continuer… quelques sourires me suffisent. 🙂
Comment ne pas avoir le sourire en imaginant les scènes ! Ces petits garçons là ont traversé beaucoup d’époques! La métaphore des zozios est au poil !
J’imagine le groupe du dortoir des filles pouvant zieuter ce beau défilé….
Il n’est pas un seul zozio identique dans toute la faune bipède et c’est toujours un excitant mystère que de faire sa rencontre.
Il est vrai aussi que le zozio, même quand il ne chante pas ses grands airs d’opéra, dit beaucoup de lui-même par sa physionomie.
Et nous, les filles, nous ne sommes pas en reste, non, non ; nous aussi aucune zézette identique et pour les concours, c’est notre ignorance et le pêché sacrilège dont nous héritions toutes, qui nous a empêché d’imaginer à qui la plus dodue, à qui le plus beau petit zozio …
Inoubliable que ces premiers pas de l’innocence vers l’autonomie par son corps ; et lorsque l’enfant a la chance de partager ses premières approches dans le secret d’un groupe de chenapans, c’est la belle école de la vie.
Entre ignorance d’hier et violence visuelle d’aujourd’hui, toutes deux aussi irréalistes, que mieux ? Je ne sais pas répondre. Mais quand on lit tel récit, on peut ressentir de la nostalgie.
Comme le disait le vieil auvergnat dans la pub Michelin « J’ai rien à dirrre ! », rien à ajouter, sinon que vous m’avez fait rire aussi.
Les filles dormaient dans l’autre aile du bâtiment, aucune chance d’assister au spectacle 😉
C’est de bon aloi pour mes pages si on y vient pour s’amuser.
Merci Bonne soirée Sylvie.
Délicieux 🙂
Je vais tenter un texte à faire fuir le monde entier.
Rien de répréhensible, rien de coquin, ce sera un test et un texte répulsifs 😉
Les choses de la vie c’est cela. 🙂
Décidément les voies de l’apprentissage des choses de la vie, pour prendre des couleurs locales originales n’en sont pas moins universelles, qu’on soit sur une ile ou le continent.
Ainsi, notre génération dut surtout compter sur ses comparses pour défricher ce qu’il en était en matière sexuelle.
Bien sûr à ce jeu, nous avons souvent pris des chemins qui n’étaient qu’impasses. Ainsi mon cousin, vers l’âge de dix ou onze ans m’expliqua-t-il la reproduction sexuée de manière si baroque que j’en fus momentanément perturbé. Si troublé que je m’en remis à ma mère. Elle devait savoir, elle qui savait tout et comblait ses lacunes en matière scientifique par de solides leçons de morale.
Elle en fut dans ce domaine tout aussi désemparée et me ménagea un rendez vous avec notre bon abbé qui lui même me confia aux soins d’une brochure qui traitait de fleurs, calices et papillons.
On aura compris que je n’avais pas plus compris ainsi.
Je m’en suis retourné auprès de mes camarades, de classe, de jeu, de sport comme tout un chacun alors avec leurs rituels initiatiques bravaches. Quelques sœurs de copains, cousines et voisines prêtèrent un peu main forte si j’ose dire. Vint le temps du lycée et l’avènement des premières classes mixtes auxquelles j’assistais et prêtais mon concours timide d’abord puis plus actif.
Comme leurs jupes plissées et sages corsages (notez la parenté des mots) étaient charmants.
Et puis, le temps fit ce qu’il avait à faire en matière pédagogique.
Tu as raison Simon : Les choses de la vie c’est cela et ce n’est pas rien.
Je n’ai rien à ajouter, Gaëtan, sinon que j’ai procédé avec un livre sur la reproduction des plantes lorsqu’un enfant en rééducation me relançait sans cesse sur ce sujet.
Une manière de temporiser car je ne savais pas comment le cerner, encore.
Ce fut la belle et tragique histoire finalement que celle du Fennec.