Charles Hubert, le téméraire.

C’est en me fiant à cette citation de Sénèque que j’ai écrit ce passage :
« Le stoïcisme consiste à accepter ce que vous souffrez et ainsi à l’empêcher de vous affecter (essentiellement le surmonter en choisissant de ne pas laisser la souffrance vous affecter…) »

Cela peut paraitre un peu audacieux, j’ai souvent comparé Charles Hubert à un stoïcien antique, j’ai toujours eu cette idée et tant pis si cela semble déborder de la connaissance précise de l’âme spartiate.
Les stoïciens éprouvaient leur résistance à la douleur en se réfugiant dans la mathématique, souvent, notre Charles villageois testait ses sensations de manière hautement risquée sans entrer en philosophie.
Il se construisait, dès la préadolescence puis l’adolescence, en éprouvant sa résistance à la douleur dans le banal du quotidien.
Au foot, il se donnait corps et âme jusqu’à s’épuiser.
Dans les instants routiniers de sa vie d’enfant, il cherchait le risque, un risque toujours mêlé d’un peu de lucidité, tout d’même, en mesurant rapidement jusqu’où il pouvait aller. Un bref calcul, une analyse rapide de la situation et le voilà aussitôt plongé dans des sensations fortes que les autres enfants n’osaient titiller.

J’en ai gardé un souvenir impérissable.
Dans ses moments exaltés, il se lâchait sans intention de nuire ou de blesser, partait dans la démesure loyale si je peux me permettre ce presque oxymore.
En défendant son équipe de rude manière, il m’avait, d’un coup malheureux, sans aucune intention de faire mal, fissuré la malléole. Il s’empressa de présenter ses excuses, je savais qu’il n’avait aucune intention de s’attaquer aux os de ma cheville, c’était dans le feu de l’action, un accident ordinaire.

Dans un article précédent, j’écrivais à peu près ceci :

« Une année de rares inondations de la place de l’église, certains faisaient de la planche sans voile sur l’immense lac qui s’était formé le long d’un impressionnant talus, aujourd’hui soutenu par le grand mur. Charles Hubert, le plus intrépide de tous, affrontait tous les dangers qui lui traversaient l’esprit.
Il se faisait tirer les cheveux avec des tenailles, sans broncher ni sourciller, pour affirmer son stoïcisme.
Il affichait sa résistance hors du commun à toute douleur, aux yeux de tous, tel un fakir en représentation.
Hubert le hardi prenait son élan du côté de la fontaine de Vichy, sur une sensation soudaine, sans calcul et sans prévenir, sautait dans le vide et explosait la grande mare éphémère qui s’était formée sur la Piazzona. Le plongeon éclaboussait tous ceux agglutinés autour de la pièce d’eau pour assister à son exploit.

Quelques timides concurrents finissaient par s’armer de hardiesse, se lançaient sans réfléchir pour ne point hésiter, plongeaient dans le lac à jambes désynchronisées, sous les jubilations des observateurs… Ce n’était pas le même envol, on devinait dans leurs tentatives presque timides pour braver le risque, une sorte de retenue, un manque de panache dans leur « amarrissage » sur les fesses, provoquant une moins vaste gerbe d’eau pour arroser les copains spectateurs. » (Amarrissage=plongeon dans la mare)

C’est toujours un plaisir de rencontrer notre ami villageois.
L’homme est authentique et d’emblée affiche sa satisfaction de vous retrouver, aussi.
Comme les anciens stoïciens, il semble avoir atteint la sagesse, ses élans téméraires désormais endormis, restés sous-jacents, résonnent encore dans les images…

Charles le téméraire assagi…

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