Girandolez !

La fête aux mots débridés.

Un peu d’extravagance pour faire pétiller l’esprit.

Lorsqu’un premier mai se tire en longueur, se fait interminable sans rencontrer âme qui vive durant la journée, forcément on baigne dans l’oisiveté.
Celle qu’on nomme « la mère de tous les vices », conduit aussi à l’évasion de l’esprit vers des horizons inconnus. Elle alimente l’imagination et favorise le rêve éveillé.
C’était mon cas hier.

Depuis le matin, un mot me trottait dans la tête.
J’avais comme une très forte envie de « girandoler ». Vous l’avez compris, ce verbe n’existe pas. Il est le fruit du farniente, vous vous en doutez.
C’est désormais une seconde nature de mon esprit, fabriquer des verbes pour inventer la fête. La fête des mots qui vous mettent en joie.

La girandole, candélabre à plusieurs branches, m’a soufflé ce verbe joyeux, grâce aux lumières qu’elle prodigue et à ses parures en cristal qui tintent avec une douce musique lorsqu’on les effleure avec un chapeau.
Directement sorti du verbe « gyrare » en latin qui signifie tourner, le verbe nouveau m’invite à gamberger puis à cabrioler là où ça me chante. Même sous les nuages et même sous la pluie. Une averse de printemps est engageante lorsqu’elle n’est que giboulée pour tempérer les chaleurs montantes. Je veux parler des chaleurs de l’esprit vagabond. Il aime cet arrosage qui fait mousser la folie douce. Ce jeu des contrastes forts qu’on se fabrique lorsque la vie n’en produit plus que rarement.

J’imagine très bien la sorcière « girandolant » à califourchon sur son balai magique laissant derrière elle une trainée blanche, traçant des volutes empanachées et des ondulations qui dessinent sa course « ricanante ».
Vous la voyez, dans les airs avec sa chevelure au vent, son nez crochu parcouru de petits volcans prêts à exploser, sa dent menaçante et son chapeau pointu ?
Elle dit « turlututu », fait un pied de nez en vous frisant le visage, la folle !

Je préfère le citron de Provence, papillon d’un jaune vif qui semble dessiner des arabesques folles dans les champs comme s’il s’était enivré en sirotant le cœur des fleurs.
Sa trompe enroulée se déplie à l’approche d’étamines « empoudrées » de nectar, il siphonne. Les pattes barbouillées de pollen, il s’en va polliniser, sans le savoir, le pistil érigé au beau milieu de la corolle voisine.
De visite en visite, c’est la joie dans le pré lorsqu’une brise légère, de surcroît, ondoie coquelicots et folle avoine.
Toute une vague où se mêlent graminées, fabacées, labiacées, papavéracées, ondule au rythme d’un souffle complice pour accompagner papillon, c’est le printemps qui batifole.

L’ânon, dans l’enclos, est plus alerte et commence à piaffer sur place. Il sent la liberté lui chatouiller ses jeunes naseaux frémissants. La pente l’attire pour qu’il s’élance à toute allure vers l’herbe plus verte, tout en bas. Sa course est désordonnée, virevoltante, un peu à hue et à dia sans qu’on l’y invite. Pirouetter, toupiller, tournoyer, tournicoter pour le plaisir, voilà ce qu’est sa liberté.

Cela vous donne envie de « girandoler » aussi ?
Je suis certain que ce verbe nouveau fera la fête dans votre mémoire, mais n’ayez crainte, il ne vous tournera pas la tête.

Alors girandolez !

Girandole,
Girandole,
se prépare à « l’affleurissage »
… et puis se pose.

Le petit plus :

Un papillon passe devant un grain de raisin et c’est le coucher de soleil automnal.

9 Comments

  1. Vous êtes un girandoleur de génie, girandolons sur vos pages, c’est un plaisir 🙂
    La dernière photo est une pure merveille !

    1. La dernier, le coucher de soleil, est un coup d’bol. Ce n’est pas un trucage.
      Un ami cher aujourd’hui disparu m’aurait dit « Il n’y a que toi pour débusquer ça ! » Je vous raconterai.
      A la prise de vue, je n’avais pas repéré le grain de raisin, mais en regardant l’image, cela m’a semblé évident.
      Voilà comment un papillon qui passe devant un grain de raisin (une grappe en fait, seul le grain était visible) on obtient un coucher de soleil.
      Merci d’apprécier mes girandoles 😉

  2. Trop lourde pour être papillon, trop ressemblante pour choisir ânon, c’est en sorcière que je décide de girandoler sans frein, rires déployés, à fond sur mon balai, folle à lier, liberté, liberté en ce second jour de mai. Pas de leste à l’esprit, des loupiottes partout, tel un ballon, envolée irrésistible à une si belle invite.

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