Ma deuxième vie.

Si je me fie à la pensée de Confucius, je suis probablement dans ma deuxième vie. J’ai donc franchi le premier palier, j’ai enjambé le seuil qui permet d’accéder à l’autre vision des choses de la vie.

Probablement s’agit-il d’aller à l’essentiel et chacun d’entre nous a son essentiel. Pour ma part, j’ai toujours été épicurien voire hédoniste, je ne fais qu’augmenter l’état de conscience de la prise de plaisir sans verser, bien entendu, dans le contrôle des actions et des évènements. C’est juste un jeu de modulations dans les crescendos et décrescendos pour créer les contrastes qui engendrent les différences d’intensité émotionnelle.

Ecrit comme cela, on peut penser qu’il s’agit d’un excès d’analyse nuisant forcément à l’effet recherché.
Evidemment non, je ne me comporte pas ainsi dans mes moments de plaisir.
C’est relâche totale et abandon dans l’univers qui me comble à cet instant.

En ce moment, je suis assis et je raconte. C’est un autre plaisir, celui d’écrire en imaginant le lecteur, ses réactions, ses humeurs.
Ne vous méprenez pas, je m’amuse. Je vous vois lisant, réagissant, je devine votre sourire. J’écris en votre compagnie, toujours.
C’est le lecteur et son plaisir qui priment.
Parfois, je vous surprends à rêver sur les images et vous embarquer dans une autre histoire, la mienne vous importe peu. Vous avez raison, c’est l’évasion qui importe, si vous vous faites la belle en fuyant par la fenêtre d’une photo, c’est gagné.
Au-delà des barreaux d’un texte, il y a d’autres vies, il suffit d’y filer à la faveur d’une idée, d’un mot ou d’une expression. C’est l’envol vers d’autres espaces, le passage dans la fiction, cela vaut le détour, le voyage virtuel devient réel, juste pour le plaisir.

Si vous volez ou si vous survolez, n’oubliez pas les nuages. C’est un espace de repos puis une rampe de lancement qui mène toujours plus haut.
Le retour sur terre est facile, l’atterrissage se produit toujours, il est rare que l’on reste dans les cieux. Cela arrive à ceux touchés par la grâce qui baignent et nagent dans la béatitude..

Accéder à la deuxième vie n’est pas donné à tout le monde. On peut vivre dans la fatalité, dans la dépendance d’un esprit fermé ou dans l’attente d’une vie après la vie, qu’on imagine plus belle encore. A chacun son Everest et ses vertiges, son ivresse des profondeurs.

Un rien m’amuse. Mais un rien dont je fais quelque chose d’autre, que je transforme ou sublime pour qu’il soit bien mieux que rien. On peut faire plein de choses avec des riens, à condition d’avoir des envies de riens qui remplissent l’esprit. Un esprit facétieux, inventif, curieux, fou, partageur, un esprit artiste qui transforme une babiole en coup de cœur, une photo banale en image rigolote, inattendue qui surprend et puis s’impose comme une évidence, un partage d’idées ou d’émotions… de sourire parfois, et cela suffit aussi.

J’ignore si vous êtes dans votre première ou deuxième vie, l’essentiel est d’être là, conscient du plaisir que cela procure de traverser l’énigme du monde vivant.

Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage et puis, plein d’usage et déraison, poursuit encore son tour d’horizon.

Être sage
Comme une image
Sans rature sur les pages
Sans maquillage
Sans bagage
Ni voyage
Sans autre rivage
Sans nuage
Ni cafouillages
Sans tapage
Ni truquage…


Quel dommage !
Il est temps de quitter sa cage.

*Ces photos ont été prises dans mon jardin. Il s’agit d’un papillon à vol stationnaire d’où son nom de sphinx colibri (ou sphinx moineau), d’autres noms encore.

7 Comments

  1. Je ne sais pas si on a deux vies ou si c’est une continuité où, arrivé à un certain âge ou à un certain niveau d’expérience, on se focalise sur l’essentiel en envoyant au diable le superficiel. On a le temps de mieux regarder et de savourer des choses auxquelles on ne prêtait pas la moindre attention avant. Et si comme vous on le transforme en art de vivre, alors on est heureux.
    La photo est magique, voilà, c’est ça le truc: ramasser, additionner des petits bonheurs (parce que LE bonheur n’existe pas) et les partager.

  2. Cela concerne surtout les jeunes après un coup dur, un accident par exemple, et qui comprennent leur cheminement et relativisent.
    Ils voient la vie autrement. On entend souvent « je ne vais plus me prendre la tête, je vais profiter à fond… »
    Ils ne sont plus dans l’attente, ils vont…
    Quant à moi, je raconte ce qui me passe par la tête et si le bonheur n’existe pas, je me l’invente.
    J’ai vraiment l’impression d’avoir vécu mille vies et je suis content de mon sort 🙂
    Merci pour le suivi Almanito et bonne suite.

  3. [… et si le bonheur n’existe pas, je me l’invente.] Ce mot « bonheur » n’est qu’un concept que l’ on aimerait toucher le doigt au moins une fois dans sa vie. Bizarrement c’est la nature qui se charge de cette relation quand on s’est débarrassé du superflu.
    Bon dimanche sous l’orage (?)

    1. Oui, nous sommes sous la pluie battante en ce moment mais pas d’orage.
      Des mares se forment un peu partout à grande vitesse, j’espère que cela ne durera pas trop.
      Quant au bonheur, je ne me préoccupe plus de savoir s’il existe ou non, je m’estime heureux sans me marabouter. Autant vivre avec cette clochette qui tinte agréablement plutôt que me morfondre. Je parle de moi, évidemment, la vie de chacun n’est pas celle-ci et je n’y touche pas.
      Je vais et je viens parmi les mots, parfois, je suis précis parfois je m’en fiche et m’amuse avec sens, non sens et contre-sens. Je cultive mes contrastes personnels et je frissonne avec eux… Voilà, j’ai l’impression de vivre bien 😉
      Merci Dominique, pourvu que la pluie ne soit pas trop saccageuse, le reste ça ira 🙂

      1. J’espère que ça ne sera pas une pluie comme dans les Cévennes ou l’Ardèche ! Mais il faut bien que la nature se douche quelque fois !

  4. « Probablement s’agit-il d’aller à l’essentiel et chacun d’entre nous a son essentiel. » En effet, j’ai l’impression que cette constatation reflète la citation de Confucius. Parfois, j’ai l’impression de faire un aller-retour constant entre ma première vie et ma deuxième vie, entre la routine inconsciente et l’épiphanie qui donne envie d’avancer à nouveau. Ou bien de se créer un nouveau chemin.
    Heureuse de découvrir ce blog, j’apprécie votre écriture 🙂

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