Ma deuxième vie.

Je commençais à désespérer.
Comme Perrette et sans pot au lait, je m’écriais déjà :
Adieu tomates, aubergines et courgettes !

Le jardin que j’avais laborieusement créé dans le maquis, en forte pente, commençait à devenir dangereux pour mes os vieillissants. Cinq fois, je suis tombé dont une avec la débroussailleuse en marche et bien harnachée. J’ai disparu dans le vide entre talus et baraque, d’une hauteur de deux mètres cinquante environ. Je voyais le ciel, coincé sur le dos, impossible de me relever et d’arrêter la machine.
C’est surtout cette fois, que j’ai commencé à me demander si c’était encore raisonnable de poursuivre le jardinage, en pente, sur des planches étroites.
Avant de réussir à stopper la râleuse, qui accélérait lorsque je bougeais, je voyais les anges du ciel qui me faisaient signe.
Signe de quoi ? Je n’en savais rien. Peut-être riaient-ils de cette sitcom (situation comique), allez savoir.
J’agitais la main en signe de refus, je leur faisais comprendre que je n’avais pas encore envie de paradis.
Mon paradis est ici-bas et je m’y plais. Un gros nuage est passé et je ne les ai plus revus.
Une autre fois, en tombant à la renverse, j’ai failli y filer sans pin-pon et sans ambulance. Mon crâne a frôlé un muret, à une dizaine de centimètre près, j’étais cuit !

Je suis sûr de courir à la catastrophe en continuant à jouer au jardinier acrobate.
Les ans s’empilent et ne se dépilent jamais, on avance vers le pire et non vers le meilleur.
J’avais dit stop, ça suffit, j’ai fait mon temps !
Cela me rendait triste, j’aime trop mon jardin, la vie n’est belle, pour moi, qu’en communiant avec la terre, même si je ne suis pas le meilleur en main verte.

Alors, il me vint une idée :
Et si je créais un jardinet de plain pied, juste à cinq mètres de la maison, hein ! Ce serait chouette, non ?

Et voilà que l’idée a fait son chemin, tout est prêt.
La petite plate forme est nickel, les semis un peu souffreteux mais je vais les secouer aussi.
Ça va aller, je retrouve mon sourire…
Ma deuxième vie commencera dès l’entrée du mois de Marie, on dit dans nos contrées qu’il est le plus beau en chantant louanges à la madone.
Mai sera ma renaissance et j’espère pouvoir tenir encore quelques années.
Si je ne suis pas appelé en renfort ailleurs, évidemment !
Le paradis doit fourmiller de gens qui préféraient prolonger leur séjour ici-bas comme moi…
Enfin, je crois !

J’ai les moustaches qui frisent disait Annie, alors c’est bon signe !

Naguère, j’avais tout essayé, j’ai même rencontré la famille Tomacchio.
La tomate noire qui devient orange à maturité.
Et la tomate du voyageur à gros globules. On l’appelle ainsi car le voyageur peut prélever un globule, chemin faisant, pour se sustenter sans abimer le reste.

Voyez comme j’étais heureux ! Toute cette petite abondance témoigne de mon plaisir

La tomate en forme d’olive s’appelle la Trilly, elle est excellente, au goût incomparable, je vous l’assure.
Mon futur petit potager est prêt, c’est encore tristounet mais on reviendra le voir aux jours heureux…

Si je suis parvenu à vous faire sourire un tantinet, cela vaut salade de tomates, à l’huile d’olive, bien entendu !
Soyez heureux.

2 Comments

  1. Il est bon de prendre en compte les signaux. J’adore la façon dont vous les racontez.
    Ce petit (nouveau) jardin va être magnifique avec votre soleil qui donne tant de saveur aux légumes et aux fruits ( il y aura encore quelques bonnes recettes à raconter).
    Bonne soirée et à bientôt. 😻

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