Ce ciel qui interpelle…

Images à mes amis villageois qui sont loin de chez eux.
C’était en juillet 2019.

Je lève souvent les yeux au ciel. C’est là que je cherche mes souvenirs et que je tente d’imaginer une suite à ma vie. C’est le visage de l’espoir.
Un espoir d’autant plus mystérieux la nuit, lorsque scintillent les indéchiffrables étoiles.

Hier, j’étais à la Piazzona en fin d’après-midi.
C’est rare et ce fut très plaisant, nous avons beaucoup ri en racontant toutes nos bêtises du temps passé. Lorsque nous nous sommes quittés, bien après la dernière partie de boules, certains riaient encore en insistant pour que je revienne plus souvent.
Aujourd’hui, j’y serai.

En regardant le ciel, j’ai remarqué, tout en haut du clocher, deux pigeons qui faisaient le tour du chemin de ronde comme deux jeunes enfants étonnés qui découvrent le sens giratoire.
Ils semblaient joyeux et insouciants. Cela a duré un bon moment.
Les martinets toujours en farandole stridente tournoyaient sans répit, engagés dans une course folle, course complètement insensée à nos yeux et notre perception humaine. Ils ont sans doute une raison de le faire, je me contentais de les regarder, de les écouter siffler dans les airs.

A la verticale, le ciel était d’un azur de gala sans la moindre tâche blanche, ni cotonneuse ni même effilochée. Au loin, au-dessus des montagnes, un peintre aquarelliste peignait la naissance de cumulonimbus. J’entendais les boules qui s’entrechoquaient, par moments, mais cela m’importait peu, je courais le temps passé, à ce même endroit, en cherchant mes vieux souvenirs dans les variations d’un céleste estival.
Un long moment, j’ai vagabondé en imaginant toutes les émotions d’un ciel.
Des expressions de peur, de tristesse, de mélancolie, de colère et même de sérieux lorsque la voute se grisaille d’un linceul uniforme sans aucun état d’âme, les paupières closes.
Ces merveilleux nuages qui grondent, qui courent, on se demande pourquoi, qui se mettent à pleurer, à tonner leur colère.
Comme les rides d’un visage, un sourire, une lippe ou un rictus, le ciel imprime ses humeurs qui expriment nos sentiments. Il suffit d’écouter les humains, se plaindre ou se réjouir des facéties nuageuses.

Là-bas, par dessus les montagnes, la météo tirait ses ficelles du moment. Les merveilleux nuages s’accumulaient puis passaient en égrainant les secondes, les minutes, les heures…
Survolant le Pinettu, ils nous rappelaient le passé, s’approchaient pour dire le présent et puis disparaissaient dans le futur derrière la colline au ponant.
Dans ce dernier cache-cache, ils semblaient m’interpeller :
– Viens voir, l’avenir est là, juste derrière les châtaigniers et les chênes du Piatonu.

Tu ne le vois point, tu l’imagines et tu espères… Demain tu sauras s’il file toujours au même endroit, secret, définitivement inaccessible, totalement introuvable galopant éperdument sous le nez des vivants qui cherchent à comprendre l’horizon.

Inlassablement les martinets se donnaient en spectacle, jouaient la même farandole, se poursuivaient en sifflant des trilles joyeux, des cris si pointus qu’ils culminaient en de hauts décibels.
Ces oiseaux au vol éternel, qui ne se posent jamais, je les ai découverts en ce même endroit, il y a très longtemps déjà, alors que je n’étais qu’un enfant. Comme une pendule dont les aiguilles s’affolent pour accélérer le temps, ils me prévenaient en virevoltant, me suggéraient le carpe diem et taisaient le bourdon.

Je regardais le ciel et me souvenais.

Six coups, lents, bien détachés ont frappé la cloche de l’église. Il était dix-huit heures, demain je reviendrai.
Si mon histoire continue, je réviserai d’autres souvenirs…

S’il vous semble que la concordance des temps n’est pas très académique et les idées peu claires, ne vous inquiétez pas, c’est que le temps qui passe est insouciant…

En partant, j’entendis comme un appel venu de l’enfance, je me suis retourné.
Le clocher de mes jeunes années me faisait un dernier signe, m’évoquant la fuite du temps…

6 Comments

  1. Tout à fait cohérant et très plaisant, ce récit ou le rêve, les souvenirs, le passé et le présent s’entrecroisent de façon poétique 🙂

  2. Salut Simon
    Je lis tes récits toujours avec autant de plaisir. Aujourd’hui j’ai entendu les ‘strioni’ de mon enfance siffler autour du clocher et de l’ancienne gendarmerie, grâce à toi.
    Je vois sur la photo de la Piazzona que la structure pour accueillir la buvette du bal de la Saint Laurent est prête.
    Merci et bel été à toi et à tous les Levianais que je n’oublie pas.

    1. Bonjour Michel,
      Quelle belle fidélité au village de ton enfance.
      Tes amis de naguère ne t’ont sans doute pas oublié.
      Bon été à toi également.

  3. c’est là ou le verbe réviser pourrait s’écrire rêviser ! merci Simonù

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *