Butiner la vie.

Le printemps est un bouquet d’émotions.

Je suis un électron libre, un papillon follet au vol chaloupé, parfois hésitant, qui butine la vie. Peu m’importe de savoir si je suis dans la justesse des choses, je porte un regard amusé sur tout ce qui m’entoure et m’interpelle.
C’est le privilège de l’âge, je n’ai pas toujours été ainsi.

Et voilà que ce titre s’imposa soudain pour une amourette qui porte le nom scientifique de briza media.
Media, comme si elle était un journal ou un magazine à elle toute seule. 
Amourette me chaut* davantage, n’en déplaise aux puristes qui vont se gargariser du doux nom de briza… Cela convient sans doute aux botanistes, aux futurs thésards herboristes, mais quel intérêt pour le passant qui passe et aura oublié le vocable dans la demi-heure qui suit.
Amourette, ça parle de choses douces, des choses de la vie, ça remémore des moments enfouis, ça discourt et ranime des souvenirs.
Alors, je m’attardais un peu avec mon kodak pour lui tirer le portrait.
Ses pendeloques me faisaient penser à la cascabelle. Au bout de la queue des crotales, cet empilement d’écailles libres que le reptile agite pour avertir de son exaspération.
Appelez-moi plutôt « cascabelle pour une amourette » pensai-je en les regardant. Une invitation à se coucher dans le foin pour y faire des bêtises et puis s’endormir.

La carotte sauvage fait clin d’œil aussi avec sa fine dentelle blanche ou rose.
Regardez ce lustre, panty renversé, avec ses pampilles à l’envers, n’est-il pas suggestif aussi ?

La nature printanière est regain de vie et de vitalité, elle invite à l’humeur primesautière, guillerette, à la prétentaine ou au guilledou.

Tout est vert et coloré, tout frétille au moindre souffle alizé.
Les idées vagabondent et s’en vont rêver dans le temps pour un sourire esquissé à la petite folie de naguère, aux parfums entêtants dont on raffolait aussi.

Le temps n’a pas d’âge pour celui qui va et vient en croyant qu’hier est aujourd’hui, pour celui qui sait faire de naguère un maintenant encore frémissant.

Le renouveau des fleurs est vivifiant, perpétue les renaissances, illumine les pupilles et allume les yeux de malice gourmande.

Une vague ondule l’herbe des champs, sa douceur s’insinue sous la chemise et caresse les joues. C’est le printemps nouveau qui vous invite à butiner la vie et toutes les envies.

A quel printemps en suis-je ?
J’éclabousse les visions d’un monde pour qu’elles aillent choir au fond d’une oreille, au coin d’un œil ou qu’elles se tapissent au cœur d’une âme. Une âme en liberté, délivrée de toutes les entraves, une âme qui pense puis disperse ses éclats de vie.

Pourquoi se pincer, s’interdire, se priver de son meilleur penchant pour l’ici et maintenant ?
Je pense et je dis, ne vous inquiétez pas, je ne fais que passer.

Un vagabond de la vie, de la gamberge dans les idées, ne cherchant même plus à comprendre la grande énigme d’ici-bas.
Partir un jour, à quoi cela sert-il de s’en aller avec un point d’interrogation sous le bras ?

Je n’étais qu’un acteur abandonné sur terre, j’ai joué ma comédie… L’ai-je bien jouée ?
Ce n’est pas mon affaire… qui vivra ne saura pas !

Me chaut= du verbe chaloir qui signifier donner de l’importance.

7 Comments

  1. C’est vrai que c’est en vieillissant que l’on s’aperçoit qu’on est passé à côté d’un tas de merveilles sans s’en rendre compte. Heureusement qu’il reste quelques années où, moins pressés par la vie, on a tout le loisir de s’émerveiller.
    La série de photos est superbe, Simonu.

  2. Les photos par leur poésie sont en harmonie parfaite avec le Verbe de ce billet, ode au respire, à l’instant éternité : « Le temps n’a pas d’âge pour celui qui va et vient en croyant qu’hier est aujourd’hui, pour celui qui sait faire de naguère un maintenant encore frémissant. »
    Que l’inspiration soit muse, elle ne pouvait être autre que fille de Zeus.
    Chaloir tout ce qui bruisse, parfume, effleure, colore ; l’attention toute pénétrée du pouvoir mêlé d’Artémis et Appolon, devenir plume, pétale, brindille ou papillon, quitter l’humaine condition pour taquiner les cieux de l’esprit et de l’âme, vibrant d’amour pour si vaste création.

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