Trente-deux ans, presque jour pour jour, séparent l’évocation « Voir son père une dernière fois » et le récit du texte qui va suivre. En 1980, c’était André avec sa famille qui avait organisé le dernier voyage de mon père ; ce jour de décembre 2012, j’étais là lorsqu’il est rentré dans sa maison pour la dernière fois.
Le 21 décembre 2012, ce devait être la fin du monde. Une apocalypse annoncée, attendue par les esprits faibles et qui fut le « non évènement » le plus médiatisé au monde. La super faucheuse, l’industrielle, celle qui commande toutes les autres devait nous emporter tous, sauf les chanceux de Bugarach. On devinait l’arnaque, mais l’atmosphère restait pesante pour les plus fragiles. Certains avaient actionné le compte à rebours final… ce fut une grande diversion pour un jour ordinaire.
C’était le premier jour de l’hiver. Tout au fond de notre village, dans le quartier Ambruginu qui finit la Navaggia, exactement dans la maison où j’ai passé une partie de mon enfance, pas très loin de la chambre de mon père, quatre mètres seulement, la faucheuse coutumière a frappé sans prévenir.
La dernière fois que je l’avais vu, André n’était pas très bien. Il préférait rester à l’écart, alors que d’ordinaire, il aimait faire un retour dans le passé avec moi. Il semblait aller mieux ces derniers temps et se préparait à passer l’hiver, profitant des rares rayons de soleil du moment, avec son fils sur la petite place. Et puis, celle qui est chargée de nous récolter est passée au moment où on s’y attendait le moins.
Je le revois encore, jeune et dynamique, qui rentrait de la forêt. Il passait comme une flèche devant la porte de mes grands-parents, faisant un geste de salut. Il était pressé de retrouver sa famille après toute une journée à scier des pins. Il n’avait pas une minute à perdre pour les siens. Le temps qu’il restait pour atteindre la nuit, il le passait dans son jardin ou à d’autres tâches agricoles. Ses moments de loisir, étaient quelques parties de chasse au pigeon. C’est avec lui que j’ai fait mes premiers pas dans le Pinetu situé en face de notre maison. Cet endroit dont il connaissait les moindres recoins, était tout proche du moulin de son enfance. Il m’avait emmené par un temps calme et brumeux puis la neige s’était mise à tomber recouvrant très vite le sommet des chênes situés tout en bas de la pinède. Les pigeons arrivaient par paquets… Je n’ai pas eu le temps de tout comprendre lorsqu’un doublé claqua sous les arbres. Deux pigeons étaient restés couchés sur la neige qui recouvrait la cime. Il était encore agile pour grimper et secouer les branches afin de récupérer le fruit de sa chasse. C’était au temps où cette activité avait encore un sens nourricier : des pigeons au riz, aux olives vertes et champignons de Paris amélioraient le menu, certains dimanches d’hiver.
Lorsque je suis parti pour une autre vie ailleurs et que le quartier se vidait, André et sa famille veillaient sur mes grands-parents puis sur mon père affaibli.
Pendant les vacances, nous passions nos soirées ensemble autour d’un barbecue jusque tard dans la nuit. Nous fixions des couvertures aux fils de l’étendage pour former un abri au vent afin de prolonger ces moments de plaisir. Il aimait bien se charger du feu, le vieux soufflet toujours à portée de main. Ces moments qui rappelaient un peu la morte saison autour de la cheminée, étaient l’occasion de nous raconter les anecdotes hivernales. Cela nous permettait, aussi, de revivre à contre-saison les souvenirs d’enfance.
L’été de l’année dernière, mon fils a voulu revivre un de ces moments de convivialité perdue, se replonger dans l’atmosphère de son enfance pas si lointaine. C’était à l’intention d’André. Il a réuni tout le quartier avec la présence des plus anciens ne résidant plus sur place. Il y avait là, Claire et Rosalie les doyennes, Jean, André, Catherine, Pierrette… Ces derniers se sont retrouvés comme au temps d’avant. Une nuit où chacun racontait son histoire, où le plaisir de faire ce pas vers le passé était évident. Nous nous étions promis de renouveler l’expérience encore une fois sur la place d’Ambruginu…
En ce premier jour d’hiver 2012, André est parti sans faire de bruit. Il s’en est allé comme il a toujours vécu, discrètement presque sur la pointe des pieds. Il restera un symbole de notre Navaggia profonde, j’aurai toujours une pensée pour lui… tant que la lame fatale oubliera de venir couper ce souffle qui a fait notre histoire.
Dans la nuit lévianaise.
tonton , tu restera a jamais dans mon coeur ….toi avec qui j ai passé toute mon enfance aux cotés de marraine j.simon Danielle Pierre .des doux souvenirs
Je pense que c’est le monsieur qui vient de décédé,raymond et battina m’en ont parlé,
vous avez une manière de raconter ces périodes ( que l’on se croierait parmis vous)
etait ce un de vos parent?en tout cas je vois que vous aviez beaucoup d’estime pour ce monsieur.
je vous souhaite un bon après midi.
Rien à rajouter Simon!!!!Juste lui souhaiter le repos en paix comme il le mérite.
Bonne soirée
Tout simplement merci de tout coeur . IL sera toujours présent à nos côtés.
un bel hommage à André qui etait comme tu le dit de trés serviable et discret qu’il repose en paix
hommage très émouvant, écrit avec une plume délicate, pleine de poésie et de pudeur.
merci Simon pour ce bel hommage a tonton .Ce tonton qui avait beaucoup de place dans mon coeur comment oublier un homme de coeur tel que lui toujours present pour sa famille je ne peux lui souhaiter un doux repos il n avait pas le droit de nous quitter la vie est ainsi faite a toi tonton a jamais dans mon coeur ta filleule Dominique