La noctuelle est une artiste.

Très longtemps, j’ai été sérieux, rigoureux, mathématique, rationnel… trop, sans doute.
Aujourd’hui, je vis dans l’éphémère, le dérisoire, le gentillet, le sourire, le « je ne sais rien » et « le je veux très peu savoir ».
Il est temps de s’amuser.
J’ai fini mon temps perdu, désormais je le gaspille presque sciemment, je le donne… J’ignore jusqu’où il m’accompagnera. Plus très loin, le gros du parcours est largement dépassé.
Je suis un retraité total et en premier lieu un retraité de l’esprit scientifique. Je ne combats plus l’impulsion de ma nature, je laisse l’anthropomorphisme prendre sa place lorsque ça m’amuse. Sans être dupe, je laisse filer mes pulsions sauvages qui font exploser toutes les barrières.
Ne pas être dupe est le maître mot, je sais que je ne suis plus dans le sérieux, je m’en fiche.
J’ai dépassé mes peurs, je suis devenu acteur de théâtre qui joue ses dernières pièces, plein d’usage et déraison…

Ce matin, en remontant du jardin, j’ai été interpellé par une petite tomate à l’œil torve et triste.
Une tomate vivante m’implorait : « Je suis mûre, viens me cueillir, je ferai bonne sauce avec toutes les autres ! Viens, je n’en peux plus ! »

C’est en arrivant près d’elle que j’ai compris que la larve de noctuelle lui avait ouvert les yeux. Une artiste qui dessine exclusivement des visages humains et parfois deux sur le même fruit.

La noctuelle lui a ouvert les yeux.
La même tomate sur l’autre côté.
C’était une autre année, la larve a préservé le grain de beauté.
Sous un autre angle.
Voici l’artiste.
A l’âge adulte, devenue papillon de nuit, la noctuelle se spécialisera dans les toiles « tranches napolitaines »

Voilà ce que je sais de la noctuelle à la larve mineuse qui creuse des galeries dans la tomate.
Certaines, car il y en a plusieurs espèces, s’attaquent à des plantes particulières, chou, artichaut, petits pois… Bon appétit !
Que dieu les bénisse, les jardiniers ne lui disent pas merci. 😉

4 Comments

  1. Il faut reconnaitre qu’elle fait des portraits très réussis. C’est moins sympa de la retrouver dans la tomate mais cela veut dire aussi que le jardinier n’empoisonne pas le jardin avec des pesticides 🙂

  2. Comme je le laisse deviner dans mon texte, je m’amuse.
    Je jardine et parfois plus que de raison, ensuite je prends ce qui se présente ou me revient.
    Le seul apport c’est le fumier de poules ou de vache, parfois de brebis, je fais les semis avec mes récoltes.
    Je suis content de mon sort mais un peu remonté contre les geais qui exagèrent. Mes figuiers sont chargés, il s’attaquent à une figue dès qu’elle commence à mûrir, il va falloir ruser, être plus matinal, pour en congeler en vue de l’hiver ou Noël. J’aime bien les figues rôties en hiver.
    Je pense que les geais, très nombreux cette année, font vraiment n’importe quoi, un vrai ravage. Mes figuiers sont énormes, impossible de mettre des filets, je passerais mon temps à me prendre la tête pour sauver quelques fruits… ou sauver les imprudents empêtrés dans les mailles. Cela m’est arrivé, et je vous assure que ce n’est pas une mince affaire, les coups de bec sur les mains ne sont pas pour de faux.
    Non, non, c’est bien comme ça. Aucun traitement. 🙂

  3. C’est le très joli texte de quelqu’un qui s’allège du poids des ans donnés, s’offrant ceux qui restent pour en faire cadeau.
    Quand à l’asticote des tomates, c’est à la fois une grande artiste et un beau papillon !

  4. « Celui qui s’allège du poids des ans donnés, s’offrant ceux qui restent pour en faire cadeau… » Joli Dominique !
    C’est exactement cela.
    C’est vrai que j’ai donné des ans à chercher pour les autres et j’ai découvert mes limites.
    Je continue à donner dans le plaisir et la légèreté des choses… 🙂

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