à dessiner des hiboux ?
Fanchon, la plus petite des trois, qui aura sept ans dans quatre mois, m’avait déjà demandé en arrivant hier soir.
Ce matin, elle revenait à la charge avec deux feuilles et deux stylos.
Je lui ai donc montré comment je dessinais les hiboux sans trop m’appliquer, en donnant liberté totale à mes coups de crayon. Elle regardait, je commentais, en insistant sur certains points qui allaient lui poser problème.
La place des pattes, la queue qui dépasse de la branche et pas derrière le rocher, les ailes, les aigrettes pas faciles à friser pour un enfant de cet âge, le regard et le bec dont la direction impriment un sens à l’image.
Ça faisait beaucoup pour une première fois.
Qu’importe, elle a essayé et voilà son premier dessin sorti du premier essai (image dans le titre).
Je pense qu’elle régressera pour les prochains essais – c’est ainsi que cela se passe très souvent – puis prendra de l’assurance et se rapprochera de l’expertise en matière de hiboux qui parlent aux humains.
A la fin de la courte séance, j’ai soupiré :
- Dommage que missiau soit vieux, il aurait pu t’apprendre bien d’autres choses !
- Ben, non ! Répondit-elle, c’est comma ça !
Voilà déjà un premier pas vers la sagesse.
Croyez-vous que j’aie balancé cette phrase pour me faire plaindre ? Pas du tout, c’est de la sorte que j’interpelle les jeunes esprits, non pas toujours avec cette phrase mais dans ce mode là, pour implanter progressivement la notion de temps.
Rien ne se passera dans l’immédiat, mais cette immersion dans les idées qui mettent en perspective, produira son effet un jour.
Un jour, lorsqu’elle sera plus grande, elle s’interrogera peut-être à l’occasion d’un signe similaire qui l’interpellera.
Elle se dira : Ah ! Tiens missiau disait ça, aujourd’hui je comprends, je saisis ce qu’il voulait dire.
Elle aura fait un grand parcours déjà, bien des idées seront installées, elle pourra penser à la conduite de sa vie.
Rien n’est certain, bien évidemment, mais je suppute et j’espère car le fil me semble bon.
Si d’aventure, elle filait sur une autre voie sans se souvenir de rien, ce sera sa vie, les choses de sa vie, pourvues qu’elles soient douces.
C’est ma manière de philosover et non de philosopher. Je préfère pratiquer la philosovie qui me semble bien plus pragmatique que la philosophie, fondée sur le concret, bien assise sur les choses vécues au quotidien.
Si tu veux philosover pense et agis par toi même, ne tombe pas dans le piège de ceux qui passent leur temps à citer ceux qui ont philosophé bien avant nous, nommés philosophes, croyant obtenir une pensée meilleure que celle des autres.
L’art d’être grand-père, pour ce qui me concerne, consiste à soulever des questions sans attendre ni donner de réponses non souhaitées.
Le temps se charge de proposer un sens à chacun.



C’était pour rattraper un ratage.
Elles garderont en elles tout ce que vous leur dîtes aujourd’hui et cela les aidera dans leurs vie, une façon de les accompagner pour toujours, d’être toujours là mais de loin, de très loin…
Les hiboux de Fanchon sont très réussis, je ne saurais pas faire aussi bien! 🙂 et je crois bien qu’ils vont faire un bon repas avec le serpent 😉
Vous avez aussi un avocatier dans le jardin?
Non, pas d’avocatier dans le jardin, l’arbre était dans l’épicerie du coin.
Lorsqu’elle maitrisera bien, il faudra commencer à faire parler les hiboux, c’est ce que j’appelais l’effet déclenchant pour lancer l’expression écrite…