« Alors là, je tombe des nues », « Il était très poli », « Quoi ? C’est pas possible, lui si serviable… », « Toujours prêt à rendre service », « ça fait des années que je le connais, il n’aurait pas fait de mal à une mouche », « Jamais un mot plus haut que l’autre », « Il vous aurait donné sa chemise », « Je l’ai toujours connu calme, serein, paisible », « Il était super gentil, il m’a invité à boire un café chez lui, c’était nickel… je ne comprends pas », « Individu tout à fait charmant qui jouait au foot »…
Quel visage montreriez-vous si vous prépariez une attaque de banque, un assassinat ou un attentat ? Iriez-vous le crier partout ?
La description, après coup, de celui qui vient de commettre un forfait répond à toutes les affirmations citées ci-dessus.
Ne ditons pas « trop poli pour être honnête », « une peau d’vache déguisée en fleur » ?
Le diable, esprit malin, se cache derrière le visage de monsieur tout-le-monde et le plus étonnant est bien qu’on s’en étonne.
Le plus surprenant est l’incrédulité affichée devant l’image publique, le masque, et les actes qui ne semblent pas correspondre au paraître.
La découverte d’un acte « en contradiction » avec l’apparence conduira à parler d’homme aux cent visages ou d’homme sans visage.
L’information de plus en plus immédiate, de plus en plus omniprésente, rapide sans être véritablement vérifiée, filtrée, secrète le doute, le flou, l’approximatif qui prennent toujours l’apparence du vrai et du juste. Chacun peut y aller de son « analyse » tout aussi peu raffinée : un jugement tronqué manquant de recul. Ainsi, fleurissent des débats qui n’en sont pas, juste des avis à l’emporte-pièce sous le coup de l’émotion ou de l’effet de surprise.
Jamais, on n’entend : « Tiens, je suis tombé à pieds joints dans le piège… »
Braves gens, ne vous méprenez pas, ce profil d’ange, du début de page, abrite bien le portrait d’un démon… pas toujours, heureusement.
Le pire des criminels a un visage humain et ses forfaits sont les faits d’un homme. (SD)