Voilà encore une petite histoire qui a débuté un été avec Leia ma petite fille. Elle commençait à lire, alors je lui offrais ce petit conte qui se tramait au fond du jardin, tout près de sa cabane bleue.
Un mois d’août, Leia avait décidé de rendre sa liberté à Ariel la tortue. Elle l’avait déposée dans l’herbe juste devant sa cabane bleue. Pas trop loin de la maison car elle n’avait pas encore l’habitude de vivre dans la nature.
Jusque-là, elle lui offrait de la salade, toutes sortes de légumes mais elle voyait bien qu’elle ne mangeait rien. Tout pourrissait dans la boîte qui servait de prison bien plus que de maison.
Ariel était triste. Leia la retrouvait tous les matins presque à la verticale à ramer avec ses pattes antérieures. Elle cherchait à s’évader et s’épuisait bien vite en griffant les parois du carton à longueur de journée. Leia comprit, à ses yeux remplis de larmes, qu’il ne fallait pas la garder plus longtemps dans sa geôle.
Un soir, la fillette décida de libérer sa copine. Avec son grand-père, juste à la tombée de la nuit, elle déposa Ariel dans l’herbe. La petite tortue née en captivité, ne connaissait pas encore la nature. Elle semblait surprise presque apeurée. Elle hésitait, reluquant à droite puis à gauche avant de faire un pas. Grand-père et Leia la regardèrent une dernière fois puis s’éloignèrent en la saluant de la main.
Le matin suivant, Ariel n’était plus visible. Aurait-elle déjà quitté la cour ? Ah ! Voilà, un petit tunnel dans l’herbe : la tortue était cachée tout près de l’endroit où elle avait été libérée. Pendant deux jours, elle a hésité et puis le troisième jour… elle disparut. A la fin des vacances, Leia est partie. Missiau qui surveillait les allées et venues d’Ariel avait beau la chercher… rien, aucune trace de sa présence. Où était-elle passée ?
Dans le grand jardin, Sniffy le hérisson connait tous les coins. Il y a belle lurette qu’il habite là. Il adore se faufiler dans les buissons à la recherche de vers de terre. Le soir à la lune, il fait un tour dans la cour de Missiau* et croise parfois Grosgroin, Croquefort et Chouineuse les trois marcassins coquins qui ravagent le jardin. Eux aussi sont friands de vers blancs de hannetons et de larves. Ils ne se gênent pas pour se servir sans vergogne dans les plates-bandes de grand-père, ravageant les plantations au passage.
Ce soir-là, la lune était pleine. Elle souriait toute seule en éclairant comme en plein jour et se mirant en plein milieu du bassin. Les rainettes adoraient ce clair de lune et se réunissaient pour un concert nocturne. On aurait dit la scène d’un opéra, avec l’orchestre symphonique au grand complet. Et lorsque le chef donnait le coup de baguette « magique », des wouah wouah wouah ! à l’unisson, s’élevaient dans la nuit douce. Sniffy s’amusait à rouler sur les petites pentes. Il se mettait en boule et se laissait emporter par le toboggan qu’il s’était inventé. Il s’arrêtait, se redressait sur ses pattes pour regarder le ciel. La lune riait plus fort, puis se cachait derrière un nuage pour éteindre sa lampe un instant. Coucou ! Elle se montrait à nouveau jouant à cache-cache avec son ami. Le ciel étoilé était calme scintillant en silence d’une myriade d’étincelles et le vent léger distribuait ses douces caresses à tous les hôtes du jardin.
Au loin, Lulu, le hibou, bouboulait, posté sur une branche de châtaignier en quête de campagnol pour nourrir ses petits.
Tout près du bassin, Sniffy a entendu un froissement sec. Curieux, il s’approche. Ariel est là carapace renversée, les pattes en l’air. Elle a dû culbuter et pédale dans le vide. Sniffy éclate de rire… Heureusement qu’il est là pour sauver la petite tortue d’une fin tragique. Il place son museau pointu sous la carapace… Ho ! Hisse ! Une fois, deux fois puis trois fois… Boum ! Ariel retombe sur ses pattes.
Sniffy est content et ri : « Que faisais-tu, les quatre fers en l’air à pédaler dans le vide ? » Très vite, ils devinrent amis. Il ne sera plus seul la nuit. Il indiquera les bons coins de fraises – que Leia connait aussi – à sa nouvelle copine.
Un autre soir, nos deux amis souvent dérangés par les petits sangliers décidèrent de leur jouer un mauvais tour. Ils ont repéré deux trous très proches dans le grillage. C’est par là qu’ils entrent dans le jardin pour labourer le potager de grand-père.
Ariel s’est postée juste à l’entrée du plus petit trou puis s’est cachée dans sa carapace. Chouineuse qui passe toujours par-là, s’arrête un instant et regarde, intriguée, ce caillou qui bloque son passage. La tortue sort sa tête brusquement, lui tire la langue et rentre aussitôt dans sa maison. Chouineuse n’est pas très courageuse. Elle trouve cette pierre très bizarre, un caillou qui tire la langue, elle n’a jamais vu ça… mieux vaut rebrousser chemin et la voilà qui file au grand galop !
Sniffy s’est placé en boule à l’entrée de l’autre trou. Il n’est pas très rassuré lorsque Croquefort le marcassin se met à grogner. Il est plus courageux et plus brutal que les autres. Comme d’habitude il pousse avec son groin humide l’obstacle qui se présente à lui. Aïe ! Aïe ! Aïe ! Qui s’y frotte s’y pique ! Il fait un bond en arrière et bouscule Grosgroin qui se trouve toujours derrière, lui grattant le museau avec sa patte en sursautant. Très surpris et même très inquiets devant ces mystères, nos trois compères préfèrent renoncer ce soir-là. Ils repartent vers le jardin du voisin en soufflant très fort. Demain à son réveil, le propriétaire du potager d’à côté découvrira peut-être un champ de bataille.
La nuit est très avancée. Nos deux amis ont bien rigolé, ils se blottissent dans leur cachette. Ariel regagne son intérieur rentrant ses pattes et sa tête, Sniffy se met en boule présentant son abri hérissé à qui se hasarderait à le déranger.
Dans leurs rêves, le hibou chantonne : « Gros bougons, gros grognons sont chassés par deux petits malins mignons… gnon… gnon…gnon ! » La carapace bouge, la boule piquante remue, nos deux amis rient en écoutant Lulu le vieux Hibou qui hulule dans la nuit.
Vous les entendez rire dans leur buisson ?
C’est ainsi que se passent les nuits douces dans le jardin du vieux missiau de l’Aratasca.
La vie est belle…
Il s’en passe des choses, dans le jardin du Maître de l’Aratasca, vos petites filles ont bien de la chance!
J’ai trouvé ceci par hasard 🙂 :
https://blogs.mediapart.fr/luce-caggini/blog/311015/confucius-au-jardin-des-plantes
Le texte que vous citez avait été écrit dans un groupe d’écrivains, un média nommé « Reflets du temps ». Un groupe dont certains membres m’avaient sollicité pour y faire partie. Je n’aimais pas « l’entre-soi » qui y régnait, je n’ai pas donné suite et écrivais deux textes à leur intention, « L’entre-soi » et « La caverne mystérieuse ». Cela n’avait pas plu à la rédactrice en chef, une femme précieuse presque ridule qui menait son petit monde de main ferme sous des apparences bienveillantes. En tous cas, elle veillait sur lui comme une tigresse. A mon adresse elle avait sorti la badine en refusant tout droit de réponse, mes commentaires n’étaient plus les bienvenus et donc sensurés. C’est dire s’ils étaient bien au chaud dans leur caverne hermétique. Ceci dit, c’étaient des écrivains de haute volée.
Luce en faisait partie mais en dame libre. Une femme écrivain, peintre et décoratrice aux EU notamment (Philadelphie, Chicago, New-York) et musicienne de surcroît (Piano) concerts à travers le monde. Elle m’avait découvert à travers mes commentaires et mes chroniques dans le monde.fr. Elle adressait ce texte à un inconnu et l’illustrait avec une de mes photos, intriguée par le brou béant (Un brou de noix ouvert qui accouchait du fruit). J’aime son écriture puissante, en liberté… A la suite de son texte dont elle m’avait averti, je lui renvoyais l’ascenseur dans un texte intitulé « Les textes Picasso » qu’elle avait apprécié. Je faisais référence à ses écrits d’une beauté forte et sauvage parfois, pas toujours faciles à comprendre, en référence aux tableaux de Picasso. Il y a souvent un côté obscur, indéchiffrable mais qui fait le charme de ses écrits…
Nous ne nous connaissons toujours pas mais communiquons, parfois, par messages.
Il y a eu d’autres découvertes, Monique la québécoise chercheuse en pédagogie, une autre, rédactrice en chef de magazine féminin écrit par des femmes qui m’offrait la rubrique éducation. J’ai donné un coup de pouce et je suis parti sur la pointe des pieds comme je l’avais annoncé…
Voilà, voilà, on avance…