Plusieurs millénaires s’étaient écoulés sur la planète carbonisée. L’obscurité était totale, le ciel n’envoyait qu’une lumière blafarde incapable d’éclairer le moindre recoin. Aucune trace de vie n’était visible dans ce monde noirci par des cataclysmes successifs.
Des astronautes gravitaient au-dessus de cette planète inerte, le charbon était omniprésent. Les radars ne captaient qu’un silence profond. Pas un souffle, pas un nuage de poussière, rien. L’immobilité parfaite. Le désastre absolu dans une atmosphère lugubre, figée, morte.
Les explorateurs de l’espace avaient perdu la notion de temps. Ils s’étaient déplacés à travers les galaxies cherchant des bivouacs sur des planètes inconnues. Ils couraient les mondes grâce à l’autonomie inépuisable de leurs moteurs alimentés par les rayons qui traversaient l’espace. Une nourriture minimale, stockée sans occuper trop de place, était censée leur assurer une survie de durée indéfinie presque infinie. Leurs corps totalement atrophiés, s’étaient adaptés à leur nouvelle condition sans qu’ils puissent s’en rendre compte. Seuls, leurs cerveaux avaient subi une transformation radicale, multipliant les neurones, les synapses, accélérant leurs facultés de calcul et d’analyse. Tous les instruments étaient commandés à distance d’un simple regard intentionnel. Ils avaient perdu toute émotion mais gardaient en mémoire le retour sur Terre.
Dans leur voyage à travers galaxies, ils s’étaient perdus dans l’immensité sidérale.
Se poser sur cette planète semblait inutile. Depuis qu’ils n’avaient plus de contact avec la planète bleue, leur exploration était sans intérêt, vaine. Pourtant, leur curiosité désormais programmée les poussait à sonder l’univers sans relâche.
Ils survolaient un endroit qui leur semblait propice à une observation plus poussée. L’aéronef se plaça en position géostationnaire juste à l’aplomb d’une masse qui ressemblait à un gros rocher calciné, spongieux, un peu plus clair que l’environnement immédiat.
C’est alors que surgit de l’ombre profonde, une sorte de diable fulminant. Tel un Dali en furie, il se mit à écarquiller les yeux, à faire frissonner ses moustaches, à s’agiter dans tous les sens en s’écriant : Enorrrmissiiiime blague ! Abracadabrantesqueeeee plaisanteeeriieue ! Sorrrs de ton rrrrêve fou, Simonu !
Les voyageurs de l’espace, découvrant le fantôme de Dali, réalisèrent qu’ils venaient d’atterrir sur leur planète Terre où la vie humaine avait disparu… Tout espoir était perdu, leur monde n’existe plus.
Désormais dépourvus d’émotions, condamnés à errer dans les décombres de l’humanité, les astronautes n’ont pas bronché.
Je me suis réveillé en sursaut, presque apeuré.
J’ai vu la Terre usée, cadavérique, morte. Une planète bleue devenue noire, charbonneuse, surmontée d’un ciel glauque, nauséeux, prêt à gerber toutes les calamités, toutes les absurdités du monde…
Le soleil couchant faisait un clin d’œil, une lueur d’espoir semblait poindre dans la douceur d’un vert et d’un jaune rassurants…
Crainte ou prémonition ? C’est la question avec les rêves.