L’anecdote est-elle reconductible, indéfiniment, dans ses moindres détails ?

Il n’est pas rare de s’entendre dire, lorsqu’on raconte une anecdote ou relate un souvenir :
– Mais ce n’est pas comme ça, je connais l’histoire précisément !
Certains se croient obligés d’intervenir pour redresser le récit, ils n’ont pas compris que ce n’est pas là l’essentiel. La transmission orale est ainsi faite, chacun raconte à sa manière. C’est ainsi qu’on s’éloigne du récit original, le fond demeure malgré tout, la forme varie.
Parfois on se fait tirer les oreilles plus sévèrement.

Cela n’a aucune importance, un souvenir heureux n’est pas un reportage, ni un compte rendu fidèle. Il est l’expression d’un ressenti, d’une impression joyeuse. Les dires exacts importent peu, la trame est invariable avec ses ondulations, ses approximations que ces dernières soient voulues ou sont simple défaillance mémorielle.

Le souvenir se fiche de la précision des faits, bien au contraire, il les manipule pour en façonner des impressions, en exprimer le jus. Il enfouit ses visions dans un coin de la mémoire et les rejoue au castelet des émotions lorsque l’envie lui prend de distribuer des sourires… ou une douleur s’il s’agit de souvenirs amers.

On ne peut nier qu’il existe aussi le souvenir précis qui résiste au temps mais finit toujours par se flouter un peu pour enjoliver, le rendre encore plus sympathique ou le déformer, l’accentuer, s’il est souffrance.
L’émotion prime sur le fait, l’envie de raconter prime sur la fidélité du récit car à l’usage on devient comédien.

Lorsqu’on entend dire :
– Ecoute celle-là, tu vas rire.
On est déjà dans la comédie de celui qui va faire un sketch. On est certain qu’il va en rajouter pour obtenir un effet stand-up, si possible, pour en tirer des rires ou des sourires.

Racontez donc à votre manière, il en restera toujours quelque chose et ce sera très bien ainsi !

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