Aujourd’hui, on ne philosophe plus, on juge à l’emporte pièce, sous le joug d’une idéologie.
Une pensée univoque issue d’une croyance ou d’une conviction fermée.
On ne devient philosophe que lorsqu’on comprend qu’il faut envisager plusieurs pistes avant de s’engager, non suivre la pensée qui surgit au prime abord.
Je me suis aventuré sur le seul chemin qui s’ouvrait devant moi et j’ai rencontré les images du silence.
Le calme régnait.
La bruine, à peine audible, tentait une variation plus sonore.
Elle gonflait ses gouttes, tambourinait un peu plus fort sur ma capuche plastifiée, puis cessait sa frénésie. Je regardais, alors, le rideau de fils de soie qui chutait devant moi, je n’entendais plus rien, tout n’était qu’images tranquilles dans un éden de paix muette.
Pas un geai, pas un merle ni le moindre petit passereau. Pas un cri, pas de tire-d’ailes sonores.
Seule, une salamandre bicolore, jaune et noire, promenait sous la pluie les couleurs du silence.
Le cou tendu vers le passant, l’œil globuleux, à la fois observateur et inquiet. Elle s’en allait sous l’averse, luisante d’humidité, vers une destination que je ne saurais vous dire. Elle cheminait dans son monde mouillé, remontant du ru qui filait en contrebas.
Aucun clapotis ne parvenait à mes oreilles. Seul le mouvement de l’eau m’indiquait la fuite de l’onde presque en catimini.
La forêt se chamarrait, les couleurs de l’automne s’affichaient déjà.
Les frênes rougissaient, d’autres essences jaunissaient, les pins et les arbousiers restaient imperturbables, n’abandonnaient aucune nuance de leur émeraude soutenue.
Je cheminais, enchanté par les images qui s’offraient à moi et je photographiais l’automne qui m’offrait ses couleurs silencieuses.
En revenant sur mes pas, j’étais rêveur, je songeais à ces lignes…
A quoi bon philosopher ?
Notre pensée sera perdue, engloutie dans ce monde qui nous regarde passer, nous toise et nous oublie…