Mon séjour en EHPAD.

J’avais été trop téméraire au jardin. Un faux pas et me voilà handicapé.
Je crois que j’ai compris la leçon, travailler dans des endroits scabreux ce n’est plus pour moi, je dois me rendre à l’évidence.

Tout penaud, douloureux de partout, petit vieux sans défense, Annie m’avait installé dans le fauteuil, recouvert d’un plaid pour que je ne prenne pas froid. Elle se montrait très gentille, très douce, très câline.
Elle me portait le repas sur un plateau, me servait des quartiers d’orange biens nettoyés, bref, elle me chouchoutait, je ne disais rien et savourais ces moments bénis, finalement très plaisants.
Petit coquin que je suis, je ne perdais miette de tant de sollicitude.
Elle me caressait les cheveux, me susurrait des mots doux tout près de mon visage. Je me serais laissé manger tout cru.

J’avais fermé les yeux et je l’imaginais disant tout autre chose :

– Tu vois comme tu vas être bien à l’EHPAD ! On va s’occuper de toi, on te dira, Ah ! que vous étiez amusant au temps passé, vous étiez adorable, un vrai Simonu – lire Simonou en appuyant sur le ou – tout chou et parfois tout foufou. Ne vous inquiétez pas, tout le monde sera aux petits soins et si vous restez bien sage le père Noël vous portera des chocolats.
Puis elle reprenait : Je viendrai te voir souvent, je te ferai manger à la cuillère, je te promènerai un peu et te parlerai des temps heureux…

Bref, je vivais un vrai cauchemar.

S’il te plait, si j’ai toute ma tête, je souhaite finir mes jours à la maison, tu verras, je vais être gentil, je te caresserai aussi et tu seras joyeuse, nous serons heureux.

J’ai eu une telle frousse de finir Ehpadé que j’ai promis de ne plus faire le zouave au jardin, je serai raisonnable et tiendrai mon rôle de grand-père à la perfection… Il faut raison garder et respecter son âge, surtout.
Quoique, même si je suis sage comme une image, je ne serai point à l’abri d’un accident. Ces choses-là arrivent quand on ne s’y attend pas, c’est pour cela qu’on les appelle accidents.

J’ai senti le souffle Ehpadien me frôler au passage.
Que la providence me préserve d’une telle éventualité et si d’aventure la nécessité m’y envoyait d’office, j’irai à reculons dans l’endroit redouté, sans pouvoir reculer, finir mes jours à contre cœur…
Voilà bien une évocation qui présage le sapin mais pas celui de Noël.
Celui qui sent très fort la résine et sur lequel est inscrit le mot FIN.

J’ai toujours adoré cultiver les contrastes de la vie, en voilà un exemple, j’aime me rouler dans l’idée des mauvais moments pour mieux savourer les bons.

Je viens juste de frissonner un tantinet pour mon plus grand plaisir, incorrigible et facétieux que je suis !

Aucun souci, tout va bien, c’est juste un mauvais moment qui m’a tamponné l’esprit et que j’ai vite balayé…

C’est presque Noël au jardin.
Clématite vitalba et cynorrhodons font belle décoration en fin de journée.

6 Comments

  1. Oh le mauvais trip 😉
    Heureusement vous savez toujours retourner la situation et penser à autre chose !
    Jolie photo (la clématite)

    1. Oui, Al, j’aime bien ces sauts et ces gambades.
      J’ai l’impression de cabrioler même lorsque je traîne la patte 😉
      J’aime bien aussi la photo quant à celle de la corde du pendu, c’est une découverte dans un village abandonné, j’y reviendrai.

  2. tant qu’il y a « l’autre » pour veiller sur soi, on se sent en sécurité….. mais après Simonu ? je me pose souvent la question………..
    Mon rêve suprême : partir en dormant avant d’être « dépendante »
    Je n’ai même pas l’odeur du sapin à la maison, le mien est fait en planches de chêne…. j’ai toujours eu des goûts de luxe 😉

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