Ce texte m’a été inspiré à la suite d’un commentaire sur « Le coq ». Cette personne relevait la dernière phrase du paragraphe que je cite en entier pour que la compréhension soit totale :
« Les filles étaient souriantes parfois plus courageuses et plus hardies que nous. Cela nous valait une caresse inattendue dont on ne savait si elle était de tendresse, d’affection ou d’un peu plus. Cela nous arrangeait bien car les plus « sérieux », en fait, les plus timides d’entre nous, étaient bien incapables d’oser le moindre petit coup de cœur. Ça faisait du bien et nous assurait un peu d’importance. A tel point que le soir au coucher, nous étions encore dans les buissons bien au chaud sous les draps. Les yeux clos et l’imagination bien fertile pour rêver beaucoup plus, en faisant du vrai avec du faux. »
Ce paragraphe résume bien la condition qui était la nôtre à cette époque. Et cela vaut pour aujourd’hui comme de tout temps. Le gros des amourettes se construisait ainsi : les plus hardis, ceux qui osaient ou avaient suffisamment d’assurance se servaient les premiers ou étaient les premiers servis. Dit ainsi, cela peut paraître macho mais c’est bien ainsi que cela se vivait. Les autres récoltaient les déceptions, les filles amoureuses d’un autre, fatiguées d’attendre que leur prince charmant s’intéresse un peu à elles. Chacun se construisait dans ces vraies ou fausses amourettes du moment. Il y avait toujours du vrai quelque part mais au dosage très variable. Cela faisait du bien à tout le monde de savoir que quelqu’un s’intéresse à vous lorsque l’adolescence vous pousse à entrer en compétition. On se contentait de ce qui nous arrivait, même si ce n’était pas la relation la plus souhaitée, et cela calmait le feu qui couvait en nous.
Lorsque le réel n’y peut rien, les laissés pour compte, car il y en avait, recouraient au rêve éveillé. Personne ne peut nous voler cette soupape d’échappement qui se nomme onirisme, très souvent orienté, et qui nous autorise à caresser les espoirs les plus fous que l’on dit inaccessibles. Le rêve richesse du pauvre, c’était la teneur de la dernière phrase notée en gras, celle qui nous conduisait au sommeil bien mérité. Les draps étaient le refuge idéal qui ne refuse rien, où tout est permis sans que personne ne se doute de rien non plus.
Hélas, on se sait seul malgré tout ce qui a pu fourmiller dans notre tête quand le réel n’y peut rien… Mais que la revanche est belle et grande ! Les plus grand amoureux ne sont pas forcément ceux à la flatteuse réputation d’un temps.