Paul était de retour.

Ce texte a figuré un jour dans le blog avant d’être retiré. J’ai préféré prendre l’avis de la famille… c’est chose faite. 

Sa faculté de vivre à la fois dans le passé et le présent était sa caractéristique première. Capable d’être, dans la même journée, l’ancien et le moderne : le matin en homme des champs déguenillé dégoulinant de sueur et l’après-midi en homme des villes, rasé, parfumé, peigné comme un artiste, tiré à quatre épingles, resplendissant comme un sou neuf.

Je le rencontrais très tôt le matin en train de nettoyer un chemin, de ratisser, de brûler… son domaine était la nature avec laquelle il communiait depuis son enfance.

Je me souviens de Cesaru armé d’une faucille, toujours courbé, se battant contre les ronces sur le chemin qui menait aux jardins de Savalè. Paul, son fils reproduisait inlassablement les mêmes gestes à près de quatre-vingts ans. Lorsque je montrais mon étonnement devant ce courage, devant cette envie farouche de coller à ses instincts de toujours, il me répondait : « Je ne peux rester sans rien faire, la retraite ce sera pour plus tard ».

C’était un amoureux de l’outil de travail. Son musée, il l’avait réalisé sur sa place et contre le grand mur qui fait face à la porte de sa maison. C’est là, qu’il exposait tous ces objets de labeur, fatigués d’avoir beaucoup servi et vieillis par la rouille du temps. Tous avaient une âme, une histoire à raconter. Il s’émerveillait de la vie, de la nature environnante ; il vivait dans la beauté des choses.

On avait toutes les chances de le rencontrer au cimetière en train de bichonner une tombe ou dans le jardin du presbytère à entretenir les massifs de fleurs que le curé avait désertés après sa retraite. Il était de tous les enterrements, de toutes les processions et se faisait tout naturellement « enfant de cœur » dont la trace avait disparu de la paroisse.

Avec lui, les curés et moines de passage pour une seule cérémonie, puisque l’église du village est désormais sans ministre de Dieu, trouvaient vite leurs marques. C’était un guide efficace…

Cet été, alors qu’il était plein d’entrain encore, il a fait une mauvaise rencontre. Une de ces choses que la vie vous impose : un accident.

A Noël, puis le jour de la saint Sylvestre, Paul était de retour. Dans la nuit où les enfants posent leurs chaussures au pied du sapin, la cheminée de sa maison fumait sous les étoiles en fête. La lumière filtrait à travers les fenêtres pour nous parler de la chaleur familiale. Je l’imaginais heureux, tout près du « cipu » traditionnel à regarder la « revia » ou le cabri s’imprégner de « salamughja » en croustillant progressivement non loin de la braise di Natali.

Je suis sûr que ses yeux brillaient de mille feux et qu’il savourait ces instants, lui l’amoureux de la vie. Un moment de bonheur si particulier à nos âmes lévianaises, à quelques centaines de mètres seulement des Noël de notre enfance.

Ce n’est plus qu’une affaire de patience : bientôt viendra le retour parmi nous… Tu seras toujours le bienvenu l’ami Paul. Nous t’attendons.

 

Un commentaire à Paul était de retour.

  1. Luce Caggini dit :

07 janvier 2013 à 18:38 (Modifier)

sur le chemin qui mène aux jardins de Savalè je vous souhaite une grande et belle année Amicalement

 

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