Il faut être fou et fort épicurien pour se lancer dans une aventure pareille.
C’est une petite aventure qui laissera des traces.
C’est la dernière fois que les petites verront les poules.
Je dois m’en séparer, tout a une fin, c’est ainsi.
Je n’avais pas remarqué que le temps, redevenu un peu clément, s’en était remis à Zeus, vent et pluie, supplémenté par Eole qu’il encourageait à bourrasquer.
Nous sommes partis tout de même à la conquête des œufs. Nana frissonnait sous les rafales.
Nous avons visité la dernière grappe de raisin, bien cachée que les geai ont épargnée. C’était du muscat noir. Au passage nous avons attrapé une figue blanche avant d’aller visiter le pommier. La dernière reine des rainettes nous attendait au pied de l’arbre, giflée par le vent. Au sol des jujubes mûrs jouaient aux billes, j’en ai croqué quelques uns, Nana n’aime pas trop.
Comme si les dieux du temps avaient pressenti notre « aventure », ils ont redoublé d’efforts pour faire plus vrai. La pluie se mit à tomber dru et les bourrasques de vent à fouetter plus fort. Le décor était planté, je me suis retourné vers ma petite fille qui semblait souffrir un peu, frissonnant et serrant les dents.
J’ai souri en lui disant : « Tu vois nous sommes en Alaska avant la neige, imagine un peu les gens qui vivent dans des conditions plus effroyables encore.
Les poules avaient déjà avalé tous les restes de jambon et pédalaient dans l’herbe que je venais d’arracher pour elles. Il y avait quatre œufs dans le pondoir, bonne récolte, elles sont cinq, les gélines !
Nous avons filé vers la maison déjà presque trempés jusqu’aux os. Le vent nous encourageait, il poussait dans le dos, j’avais l’impression de voler, Nana riait : Missiau ! Tu grimpes vite !
Oui, c’est le vent qui m’encourage, fais attention, il risque de t’emporter…
Ce sont des moments comme celui-ci qui m’ont construit en m’enseignant les contrastes de la vie. Passer du froid humide à la douceur de la maison, le ciel bas, le brouillard omniprésent et puis le coin du feu. Du frison à la douceur d’un âtre qui ronronne, c’est la vie qui préside.
J’ai aimé la redécouvrir ainsi, j’ai lancé quelques parfums du vivre autour de ma petite fille…
Durant quelques minutes, je suis redevenu un enfant et nous riions comme si nous avions le même âge.
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