La marchande d’Arlequins.

Ce texte est une reprise. Encore un qui avait été massacré, dans sa forme, lors du transfert de l’ancien blog au nouveau. Un repiquage souvent raté, je n’ai jamais compris pourquoi.

Je lui donne une seconde vie, il a presque valeur de reportage.
C’est l’ami Roger Z. qui m’avait envoyé quelques photos anciennes pensant que j’en ferais bon usage. Mon attention s’est portée sur la marchande d’Arlequins. (C’était plus souvent marchande que marchand)

Ce jour de février, le temps était maussade, la grêle tambourinait sur les vieux ustensiles laissés dehors depuis belle lurette. Le feu de cheminée racontait ses histoires anciennes à travers flammes et tisons. Une gerbe d’étincelles était feu d’artifice à la Saint Laurent, un charbon endormi, recouvert de cendre, devenait neige poudreuse et le tison qui bavait avec un léger « frissement » (verbe inventé dont le sens est induit, implicite) réveillait la coulée de la rivière que j’écoutais en traquant la truite. La flamme jaune, orange, et bleutée par endroits, se faisait danseuse gitane d’un timide flamenco…

La carte postale gisait sur la table basse, elle traînait là dans l’attente d’une idée, d’un voyage dans le temps au cœur du vieux Paname.

La marchande d’Arlequins.
Un métier surprenant, inattendu, qui consistait à récupérer les repas de la veille dans des familles riches ou des restaurants. Ces restes appelés également rogatons était transportés dans des carrioles aérées puis nettoyés, triés et réorganisés de manière appétissante ou attractive, à l’abri des regards, pour être plus présentables et donc plus facilement vendables. C’est cette composition des repas, un peu au hasard en fonction des viandes et autres ingrédients récoltés, qui a valu le nom de « marchand d’Arlequins » en référence au costume coloré du personnage de la Commedia dell’arte. Les moyens de conservation des aliments cuisinés n’étaient pas encore d’actualité, la marchandise devait disparaître le plus rapidement possible. Entre midi et treize heures tout était vendu. D’abord à des riches radins plus ou moins abonnés, puis au tout venant, ouvrier modeste peu argenté qui préférait se nourrir ainsi à peu de frais. Les derniers reliefs disparaissaient pour nourrir des chiens de luxe. Et les os, parait-il, revenaient à des marchands de bouillons cubes ou de gélatine.

A quelque chose mauvais temps est bon, de quoi oublier les embrouilles entre pluie, vent et grêle d’un jour de février, en quelques minutes, je venais de réaliser ce petit interlude qui vous plaira peut-être.

Parmi les métiers perdus, la marchande d’Arlequins n’est sans doute pas la plus connue.

Je vous souhaite une bonne soirée.
 

1 Comments

  1. C’est vrai, j’avais entendu le nom sans savoir exactement de quoi il retournait. C’était un temps où rien ne se perdait, sans dire « c’était mieux avant » on était loin du gaspillage actuel

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