J’avais mesuré au fil des rencontres avec les enfants, combien il était difficile d’appliquer une méthode sans tenir compte de leur profil. La difficulté face à l’apprentissage scolaire témoigne d’abord de leur difficulté dans la vie. Souvenez-vous de « l’épervier », ce garçon qui occupait l’espace par le mouvement, en quête affective permanente, voici « le coucou » qui occupe l’espace par le volume…un trop plein d’amour.
Le coucou ne construit pas de nid et se contente de pondre son œuf dans le nid des autres oiseaux souvent plus petits que lui. Dès l’éclosion, l’oiseau envahisseur n’hésite pas à défenestrer le reste de la nichée afin d’occuper toute la place. La mère adoptive, un petit passereau, commence alors un va et vient incessant pour gaver de « friandises » cet intrus difficile à rassasier.
Cette curiosité de la nature a resurgi du fond de ma mémoire de campagnard lorsque, pour la première fois, je fus amené à rencontrer la maman de Michel.
Michel était un gros bébé plus grand que les autres enfants de sa classe. Il bougeait très peu et se contentait de boire mes paroles avec un sourire béat de satisfaction. Tout ce qu’il ingurgitait était avalé tout de go sans qu’il prît le temps de savourer quoi que ce soit. Il était d’un naturel placide, tranquille comme Baptiste et n’approchait la chose scolaire que superficiellement pour laisser son corps occuper l’espace, non par le mouvement mais par la masse. Un vrai coucou heureux quoi !
Il était si peu habitué à prendre une initiative que pour barrer un trait horizontal, il le repassait d’un trait horizontal, intrigué qu’il ne semblât point barré, restait perplexe et interdit.
Il hochait la tête pour mirer tantôt de son œil gauche, tantôt de son œil droit puis m’interrogeait du regard marquant sa surprise… Tiens, ça n’a pas bougé ! le changement n’était pas son truc !
Lorsque je vis sa maman pour la première fois, guère plus grande que son fils mais bien plus menue, je ne pus m’empêcher de penser à cette mère nourricière pleine d’attention pour son « coucouneau ».
Elle le couvait du regard et me parlait de lui comme d’un œuf fragile, à manipuler impérativement avec précaution. Des paroles douces et apaisantes, des gestes caressants : elle l’enveloppait d’amour à l’état pur.
Dans ce brouillard cotonneux qui l’isolait de l’extérieur comme dans une douce bulle, Michel était aux anges.
Je suis sûr que même hors de sa présence, les appels silencieux qui émanaient de l’enfant battaient dans la tête de cette mère anxieuse, comme un cœur dans la poitrine : coucou !… coucou ! … coucou !…
Il n’est pas facile de transformer un coucou en joyeux pinson lorsque la mère couveuse tisse un épais cocon pour protéger son oisillon.
Michel était docile, l’apprentissage de la lecture fut pénible mais possible, il dut laisser quelques plumes, notamment dans la compréhension fine… La pesanteur de son corps s’était installée dans sa tête aussi.
Incapable d’aller chercher plus loin la nourriture que sa maman lui tendait, il se contentait du minimum vital qui lui était proposé pour assurer la survie scolaire.
L’apprentissage de l’autonomie devenait urgent mais maman n’y tenait pas beaucoup.
Papa était absent total, absorbé par son travail et l’idée d’engranger pour retourner un jour dans une belle demeure construite dans son Portugal natal.
Coucou ! Coucou !
J’ai beaucoup aimé tu pourrais raconter plus d’histoires sur des enfants svp.
Merci petite fille, je te raconterai ces histoires lorsque tu viendras chez nous.
Elles sont toutes rassemblées dans un recueil,.
Avec papa, on essayera de les publier pour vous.
Vous apprendrez les choses de la vies, les enfants qui galèrent, qui font ce qu’ils peuvent…
Il y a de belles leçons à tirer pour la conduite de votre vie 🙂
C’est ton premier commentaire sur le blog de missiau (grand-père), à bientôt neuf ans, ça fait plaisir de te retrouver là.
Je vous embrasse tous. 🙂
A reblogué ceci sur Les choses de la vieet a ajouté:
A méditer.
Joli commentaire de votre petite-fille qui m’a l’air d’un petit pinson joyeux contrairement à ce pauvre gamin trop couvé par sa maman 🙂
Chaque fois qu’elle vient chez nous, elle me demande des récits d’enfants.
Elle aime beaucoup l’angle choisi pour en parler, je la vois rêveuse… Puis, encore une, encore une… Certaines sont dramatiques;
Bonne journée Al.
Du coup j’en ai oublié de dire un mot sur le hibou, son expression de dépit est excellente, j’ai éclaté de rire!