Clinicienne de surcroît !

Nous avons tous un travers caché ou affiché.

J’avais une collègue, une femme charmante, souriante, au regard d’un azur de tropiques à vous transporter sur une plage paradisiaque sans attendre les vacances d’été. Des éclats de rire qui venaient du fond de la gorge trahissaient le plaisir franc de celle qui s’abandonne à sa joie, qui s’éclate sans vergogne.
Une femme heureuse d’entrer dans la vie active pour sauver les enfants…
Un bonheur qui se voyait sur toutes ses dents blanches, ses fringues affriolantes et son vernis à ongles toujours impeccablement lissé…

Une psychologue scolaire qui ne supportait pas d’entendre le mot scolaire.
Issue de la deuxième génération c’est à dire de formation universitaire contrairement aux premiers psys qui étaient des instituteurs défroqués. Des enseignants chevronnés formés sur le tas pour dépister les débilités légères ou avérées, sur les bancs des écoles. Des traqueurs de QI pour orienter les enfants vers des structures mieux adaptées à leur cas, pensait-on.

Notre blondinette fraîchement sortie de l’université sans jamais avoir fréquenté une classe, tenait à son statut de psychologue formée à l’étude des cas que l’on dit clinicienne.
Ah ! Elle était fière de ses prédécesseurs, Freud, Jung, Lacan et Cie. Elle ne ratait jamais l’occasion de le faire savoir.

La pimpante demoiselle, mariée de surcroît, avait une faille dans sa carapace. Elle ne supportait pas de recevoir le courrier adressé à la psychologue scolaire, accompagné de la mention « Institutrice ». Les lettres qui venaient des différentes écoles devaient porter cette mention pour bien signaler la circulation interne à l’administration afin d’éviter le « timbrage ». La poste ne taxait pas ce courrier.

Puisqu’elle était nouvelle dans la fonction, je lui rappelai cette pratique afin qu’elle ne s’en offusquât plus. C’était le lot de toute personne navigant dans les écoles.
Ha ! Ça ne lui plaisait pas.

J’ai donc entrepris de la vacciner, de mon propre chef, sans rien lui souffler. Je recevais le courrier adressé à notre structure et devais le dispatcher entre les différentes composantes.
Avec un grand soin, un stylo Bic rouge et une règle plate, je soulignais le mot « Institutrice » et déposais son courrier sur son bureau. Cela dura quelques temps sans qu’elle ne se plaigne de rien. Je pensais qu’elle commençait à s’y faire.
Que nenni ! Un jour, alors que je me trouvais dans son bureau au moment d’ouvrir son courrier, elle me tendit une lettre et me dis :

– Regarde, là, je n’en peux plus ! Maintenant, ils soulignent en rouge !

Je fis l’étonné, l’étonné à moitié, en avançant qu’il y avait dû y avoir quelques erreurs de la poste en taxant le courrier. Ils soulignent pour bien montrer qu’il s’agit d’une missive d’école à école. Sans doute.
Cela la calma à peine.
« Quand même ! » soupira-t-elle.

Le téléphone sonna. Au bout du fil, un parent d’élève souhaitait parler à la psychologue scolaire. Elle rougit légèrement puis sans trop perdre son sang froid, elle se présenta :

– Je suis la psychologue scolaire, clinicienne de surcroît !

Ouf ! L’honneur était sauf, il ne faut pas tout mélanger, tout de même ! Elle semblait soulagée.

Moralité : Que vous sortiez de Saint Cyr ou d’ailleurs, de la cuisse de Jupiter de surcroît, ne tempère en rien le naturel, c’est toujours au galop qu’il revient.

Evidemment, elle n’a jamais su que c’était moi qui soulignais en rouge le vilain mot qui la faisait passer pour une institutrice.
Quelle honte ! 🙂

Des muscaris, au meilleur de leur forme de surcroît ! 🙂

2 Comments

  1. Des muscaris .
    Je ne crois pas que ces belles fleurs soient des lupins .
    Scusi o Simo..

    1. Bien sûr Marie-Hélène, ce sont bien des muscaris.
      J’ai dû rêver un instant 🙂
      Je crois même en avoir publiés sans lapsus calami.
      Merci, je vais rectifier.
      Bonne soirée 🙂

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