Anecdotes scolaires.
Nos jeux à la récré étaient bien différents de ceux d’aujourd’hui.
Pendant que les filles jouaient à la corde à sauter ou à la marelle, Jean Pierre Fornesi théâtralisait le poème d’Aragon « Ballade de celui qui chanta les supplices ».
Il était au fond de la cour contre un mur, déclamait sous la torture d’autres élèves :
Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemains
Sous les coups redoublés de ses bourreaux, il relançait :
Et si c’était à refaire
Je referais ce chemin
Sous vos coups chargés de fers
Que chantent les lendemains…
A l’autre bout de la cour, Pierre fuyait la meute de chiens qui lui courait après. Aculé dans une encoignure, le sanglier aux abois mettait genou à terre et le chasseur l’achevait d’un coup de fer. Il criait comme crie le cochon que l’on égorge.
Chacun dans son univers préféré refaisait le monde en s’identifiant au poète, au gibier chassé, au docteur ou au laboureur des champs…
Hélas, il faut bien que passé lointain s’efface un jour. Lorsqu’un passé n’éclaire plus, une autre lumière allume le présent, sans passé le présent n’a plus d’âme.
A chaque génération sa lumière, la nôtre s’éteindra bientôt, j’en laisse quelques éclats, quelques rayons faiblards…
Ci-dessous, ces autres effets théâtraux, une autre comédie que l’infusion ambiante de l’humour a perpétué jusqu’à nos jour et peut-être, c’est moins sûr, se prolongera encore peu…
Le maître venait d’avertir les élèves :
« Je ne veux plus entendre parler corse, ni en classe ni dans la cour. »
Dans la foulée, il interroge un écolier pour qu’il récite le résumé de géographie.
A cette période, chaque leçon était ponctuée d’un résumé à apprendre et le maître faisait semblant de chercher l’acteur du moment, on pourrait presque dire la victime du jour.
L’enfant se lève, nous étions deux par banc, et lance le titre à la cantonade d’une voix claire et nette :
– Le bocage Vendéen !
Son voisin de banc le touche avec le coude et lui souffle rapidement :
– Attention, pas de corse, on dit Le beau fromage Vendéen.
Cette anecdote est incompréhensible si l’on ne parle corse.
Casgiu= fromage, beau casgiu=(Bocage-beau fromage).
La maîtresse de maternelle avait conseillé à une dame de laisser sa fille une année de plus dans sa classe.
Elle n’était pas prête pour le CP.
– Alora travadda bè a zitedda ? Passa n’u primariu ?
– Si tu vidi com’a volini bè, a tenini cussi ! (en montrant la paume de la main) Infantimighjani ! A maestra a voli varda un’antr’annata !
– A volini bè ? Meddu, meddu ! Meddu pà idda.
(La maman disait que la maîtresse aimait bien l’enfant et voulait la garder une année de plus.)
Un classique :
« Au cours d’un jeu à la campagne, vous êtes frappé par le pittoresque du paysage.
Racontez. »
« Un jour, je jouais à cache-cache à Cacareddu.
C’était moi qui cherchais et ne trouvais pas les autres.
J’avançais doucement, doucement, arrivé derrière le châtaignier, Pan ! j’ai reçu un coup derrière la tête, c’était le pittoresque qui était caché derrière le tronc. »
– Ba ba ! I t’ha fatti fallà bè ? dici u maestru.
(Il t’a bien bastonné ? dit le maître.)
Voici une variante. Certains à force de récits, et pour forcer le rire, finissent par modifier l’original.
En voici un exemple :
« Pan, j’ai reçu un coup dans le tupizzu » (coin de tête)