Avertissement : Les photos n’ont rien à voir avec les anecdotes, c’est pour moi l’occasion d’offrir aux Levianais des clichés du passé…
Ce soir, il me vient une idée : Et si on se racontait nos anecdotes anciennes !
J’ai réalisé un recueil d’histoires de l’ancien temps. Des anecdotes qui changent de couleur au fil des récits, qui se transforment dans le temps, chacun apportant sa touche, sa distorsion.
On les appelle « i foli » car on dirait des fables, des contes donc des historiettes inventées alors qu’elles sont vraies, totalement vraies si l’on oublie les ajouts propres à chaque conteur.
J’en ai récolté, ce me fut facile car je les raconte souvent, plus d’une centaine.
Hélas, ce recueil que je voulais publier en langue nustrale c’est à dire écrites en corse, afin de les garder dans leur écrin d’origine, dans leur bain, leur saumure, ont du mal à franchir les portes de l’édition.
C’est pourtant une richesse, l’état d’esprit du passé dans nos quartiers, nos villages qui resurgit à travers ces récits et perpétue l’état d’esprit de nos anciens qui n’avaient ni télé, ni portable, du temps où internet n’était même pas en gestation.
J’ai renoncé à courir après les éditions qui ne répondent pas aux mails ou le font très tard, quelques mois après lorsque vous êtes découragé et passé à autre chose.
J’en raconterai deux ou trois de temps en temps pour faire plaisir à mes villageois qui en sont friands.
Je les écrirai en français avec quelques inévitables expressions en corse, c’est beaucoup plus imagé car souvent une boutade doit être traduite par une phrase qui dénature un mot juteux en ôtant le charme initial de l’histoire.
Voici :
Un jour, devant le bar de Maria Barbara, un entrepreneur quelque peu énervé, cherchait à trouver la panne de son camion. Il avait soulevé le capot et observait le moteur pour identifier l’origine du dysfonctionnement.
Il était midi, un client, un peu beaucoup éméché s’approche du camion, passe sa tête sous le capot et se trouve nez à nez, presque front contre front avec l’entrepreneur.
Désignant une durite, il lui demande :
– Qu’est ce que c’est ça ?
– Je vais te le dire, ça c’est le tuyau qui est branché au tonneau de Maria Barbara !
(Quissu hè u tubu imbrancatu à a butti di Maria Barabara !)
Deux militaires de carrière étaient encore première classe dix ans plus tard.
Un gradé corse est muté dans le bataillon et cherche à savoir s’il y a des corses à la caserne.
Il rencontre les deux compatriotes et s’adressant à l’un d’eux :
– C’est quoi la France pour toi ?
– La France est belle. (A Francia hè bedda !)
– La France c’est ta mère imbécile !
Puis s’adressant à l’autre :
– Et toi que dis-tu de la France ?
– La France c’est la mère de mon copain, je ne le savais pas, je viens de l’apprendre.
( A Francia hè à mamma di u me cumpagnu, ùn la sapiu mica, vengu d’impara la.)
Notre ami Jules, mondialement connu au village, comme on dit chez nous, vivait à Marseille.
Son père s’appelait André.
Un villageois le rencontre à un à un arrêt de bus, s’étonne de le voir là :
– Qu’est-ce que tu fais ici ? (Chi faci qui ?)
Jules se tourne vers le magasin « Chaussures André » juste derrière lui :
– Tu vois bien, j’attends papa, il se chausse !
(Ùn vidi, aspettu à babba, si calza !)
Son père était décédé.
Evidemment, ces « foli » racontées en corse ont une toute autre saveur !