La jeunesse revient au galop.

Mes amis Antoine et Paul se retrouvaient après une longue absence.
Nous étions quelques uns à les accompagner, j’étais à leurs côtés, tout proche, je les regardais plus que je ne les écoutais, vous en savez les raisons. Mon audition défaillante m’engage à l’évasion, à l’observation plus qu’à l’écoute lorsque les circonstances ne me permettent plus de suivre une conversation.

Alors, je les observais.
Très rapidement, des sourires se sont illuminés. Des regards se sont croisés, les yeux devenus interrogateurs semblaient dire : Tu te souviens ? C’est bien ça, non ?
Et le sourire, parfois un petit rire difficile à contenir, ponctuait la dernière déclaration.
Ah, voilà Paul un peu plus sérieux, le visage devenu un peu sévère, à peine. J’imaginais un passage moins apprécié. Un mauvais souvenir, sans doute.
Mais étaient-ils enclins à relater des passages qui fâchent ? Non, le sourire rebondissait au galop car un autre fait ancien venait submerger la vilaine évocation.
De temps en temps, Antoine se tournait vers moi, Paul me faisait face, pour vérifier si je suivais ou si j’étais largué. Il me connait.
– Tu as entendu ! me lança-t-il.
– Non.
– Paul disait… et il me résumait ce qu’ils venaient de raconter tous les deux.
Le sourire s’étendait à trois. Nous étions unis dans une large complicité.
Paul tapota le genou d’Antoine et les voilà repartis dans le temps, à évoquer une anecdote surgie de leur jeunesse.
L’instant était béni, le plaisir de se remémorer des moments anciens me semblait évident.
Le souvenir est un ressenti bien vivant, il est en sommeil, en attente d’un réveil et c’est presque un sentiment.
Pourquoi le laisser à l’abandon, dormir dans l’ancien temps ?
Il est là pour rappeler ce qui nous a réjoui, ce qui nous a plu dans notre vie passée…


Sans doute me savait-il perdu dans le vague, Paul me regarda en plissant les yeux et m’interrogea :
– Tu as m’a suivi ?
– Non Paul, mais vous voir converser ainsi est largement suffisant. Je vous regarde et je comprends que vous êtes plongés dans vos moments heureux.

Vous qui êtes à l’affût d’une critique, cessez de nous taxer de passéistes.
Laissez-nous revivre notre jeunesse, à notre guise, c’est bien ainsi que les hommes vivent.
Il suffit de se taire et de regarder à quel point le sourire d’un homme reste un espoir de vivre éternellement.
Eternellement ? Oui, vous m’avez bien compris !

Je vais te faire une confidence… (Et puis, je n’ai rien entendu)


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