Comme des petits cadeaux successifs sortis d’un cornet, qu’enfants nous appelions « fortune », c’est ainsi que je pratique et que j’aime la vie.
J’aime ces mots qui se travestissent au dernier moment, par surprise, au cours de l’écriture, pour ajouter une nuance au sens qu’ils portent ordinairement.
Des mots clowns dont l’apparence se modifie sous le regard pour le besoin d’un petit plus épicé, sucré ou légèrement acidulé.
Des mots bavards qui ne tiennent plus en place et ont toujours plus de choses à dire.
Des mots buvards qui soudain s’imprègnent d’un bouquet particulier, exhalant une fragrance nouvelle.
Je ne suis jamais surpris par la vie qui s’exprime à travers ces mots, même lorsqu’ils surgissent d’un lapsus linguae qui semble trahir une émotion.
« Grand-mère n’a pas survécu aux fortes chaleurs de cet été, la ‘canitule ‘ fut terrible. »
Vous comprenez pourquoi ces mots vous échappent ? Non ? Relisez-le.
Parfois, j’accentue l’impact de l’affect en suggérant que c’est « tsychologique », bien plus que « psychologique », un sens qui stridule ou zinzinule à nos oreilles.
Je m’amuse avec « l’arrossoir » qui fait sssss car sa pluie est plus sifflante et plus fine que celle sortie d’un arrosoir, rasoir.
Je regardais des clichés.
Devant une touffe fleurie, ma vue s’est troublée et l’image s’est transformée sous mes yeux.
Un léger frémissement de surface, comme les ronds d’un ricochet sur l’onde, a tout chamboulé.
Je somnolais dans une divagation onirique, une vibration s’élastique et trembloie, se propage dans un rêve fantastique comme des ronds concentriques qui s’éloignent.
Deux verbes venaient de naître pour la circonstance, juste pour décrire ce décor nouveau… des verbes à usage unique seulement.
S’élastiquer pour suggérer que tout s’étire à l’extrême en s’effilochant au mouvement.
Trembloyer, bien plus que trembler ou trembloter, évoque un ectoplasme, un esprit malin, un Aladdin qui s’agite, semblant danser sur une musique lascive, puis se noie.
Etre à l’affut de la vie dans toutes ses nuances, c’est ainsi que je vis.
Ses parfums, ses caresses, ses images.
Sa réalité, son imaginaire, ses tromperies.
Sa joie, sa douleur, son indifférence.
Sa douceur, sa brutalité, sa moquerie.
Ses cris, ses pleurs, ses éclats de rire.
Mes mots sont vivants et disent la vie.
Ils se tortillent comme des chrysalides qui cherchent à se libérer de leur cocon carcan, puis déploient leurs ailes pour s’envoler vers une liberté éphémère.
Une liberté en sursis dont on ignore la durée.
La fragilité du vivre pour qui n’a pas encore commencé sa deuxième vie, qui attend, sans le savoir, le mauvais coup qui va le réveiller…
J’aime les mots qui se métamorphosent, roses ou moroses, toniques ou apathiques, croquignols ou guignols.
Les mots qui s’évadent d’un cornet surprise qu’enfants nous appelions « fortune ».
Ces mots bavards, ces mots buvards…
Ces mots
Renards
Bobards
Clochards
Pétards
Ringards
Etendards
Briscards
Ou cafards…
Ces mots de hasard.
Bonsoir Simon,
La vie à l’envers ! Comme toujours les mots danses ,d’autres somnoles 😉, mais toujours avec humour .
Belle soirée .
C’est mon carburant !
Bonne soirée Pierrette. 🙂