Certes, il n’est pas facile de relativiser, tout est d’affaire de vie personnelle et de vision de midi à sa porte.
La relativité pour soi n’est pas celle des autres.
Il m’arrive souvent de m’arrêter devant une partie de boules, une partie de roule-roule ou de roule boule.
Toujours les mêmes comportements dans un jeu pépère dont le seul intérêt est de se dégourdir les jambes, c’est déjà une belle affaire.
Je regardais une nouvelle fois cette mystérieuse affaire, cela m’amuse de voir ces comportements, je cherche à comprendre alors qu’il n’y a rien à chercher tout est affiché, clair et net.
La partie se déroulait en quadrette soit seize boules au total. Vous imaginez facilement que les deux derniers joueurs, avec douze boules autour du cochonnet, n’ont plus de place pour approcher le bouchon. Le tir est rarissime pour ouvrir le passage. Ici, on pointe à perpétuité, pour une raison toute simple, on ne sait pas tirer, disent-ils.
De temps en temps on assiste à une scène improbable. Le dernier joueur, pieds tanqués dans le rond, super attentif, lâche sa boule juste à ses chevilles. Elle démarre, roule tranquillement, cherche son chemin, ralentit, et, à petits coups caressés d’épaules, se fraye un passage dans un dédale difficile à déjouer. On aurait dit qu’il y avait un chauffeur à bord pour diriger la manœuvre jusqu’au cochonnet. Lorsque la sphère métallique vient faire la bise au petit dans un mouvement de ralenti incroyable avant de s’immobiliser, des applaudissement fusent dans le camp du virtuose qui ignore comment il a fait. Il a juste lâché l’engin roulant en lui souhaitant bonne route. Les adversaires abasourdis lèvent les bras au ciel devant l’improbable cheminement.
Dans la foulée, on entend : « Cul bordé de nouilles ! Tu as la chatte ! Tu devrais jouer au loto aujourd’hui ! Lorsque ce n’est pas la pauvre épouse qui en prend pour son grade, accusée de le cocufier… »
C’est ainsi tous les jours à longueur de temps praticable. Le jeu est mécanique, instinctif avec des réussites de tombola lorsque le geste peu académique pour un pétanqueur, main ouverte vers l’avant, semble dire « Allez, va gagner ta vie ! ».
C’est amusant, il ne faut surtout pas troubler leur onde dormante, me susurre feu Jean de la Fontaine !
Parfois, je me demande : Pourquoi ne tirent-ils pas plus souvent ? Ils s’amusent, il n’y a rien à perdre et tout à gagner en s’exerçant au tir ? Les grands joueurs gagnent les parties au tir !
Un brin de vie que diable !
Pouh ! Les grands joueurs, les grands joueurs ! On s’amuse, nous ! Eux, jouent pour de bon !
Ne leur demandez pas pourquoi, il vous répondent invariablement : On ne sait pas tirer !
Bon !
Un jour, je les regardais qui se disputaient presque. L’un voulait tirer, l’autre lui rappelait qu’il n’était pas tireur… Oui, mais si… Non mais si… bref, la valse hésitation dura un long moment pour finir par une boule pointée devant une barrière de boules impossibles à contourner. Le stock restant fut joué en pure perte.
C’est à ce moment précis que l’on entendit un son de cloche, j’ai pointé mon doigt vers l’oreille pour les interroger. L’un d’eux me dit : C’est le glas !
Eh oui, répondis-je, quelqu’un s’en va au cimetière et vous vous chamaillez pour savoir s’il faut pointer ou tirer, sans aucun intérêt au bout de l’affaire !
Personne n’a compris si j’en juge par leur sourire presque attristé pour le défunt.
Je me suis tu de crainte que l’un d’eux ne dise, la prochaine fois on jouera à dix, cinq contre cinq !
Plus il y a de boules et plus on rigole !
La relativité des choses n’est jamais acquise pour tout le monde, même lorsque vous arrivez au bout du chemin, les pépères n’en étaient plus très loin… On ne dérange pas qui commence à freiner pour éviter le précipice…
Un texte oisif et peine perdue 😉
Oisif je ne sais pas mais joliment philosophique… philosovique pardon 😉
C’est parfait, le terme figurera en bonne place dans un prochain ouvrage qui lui fera la part belle.
Bonne semaine Al ! 🙂