Antoine Marchetti.

L’ami Antoine, je l’appelle ami alors que je ne l’ai connu que deux années scolaires au Lycée de Sartène au milieu des années soixante, était un lycéen attachant, simple et souriant.
J’ai gardé le souvenir d’un jeune homme amoureux du cyclisme. La petite reine était son dada.
Dans toutes ses interventions ou presque, il y avait un vélo, un cycliste, un Anquetil, un Poulidor, un Gimondi, une montée de l’Ospedale… et des coureurs locaux. Ce dont je me souviens très bien.

Le soir au dortoir, en attendant d’être sermonnés par le pion de service, nous nous groupions autour d’un lit pour raconter des anecdotes de nos villages. Il était le spécialiste de la région de Porto-Vecchio et moi de l’Alta Rocca. Nous étions souvent, les seuls conteurs intarissables et nous rivalisions d’effets comiques. Des allées et venues entre plage et montagne, un colp’à te, un colp’à me !
Un coup toi, un coup moi comme on aimait « sfranciser »…
Autour de nous, les copains se frottaient les mains. Ils savaient que le rire, même étouffé pour ne pas alerter le surveillant, allait être de mise.

Je me souviens de son histoire préférée, une histoire d’amateur de vélo, bien entendu. J’ignore le nom de la personne concernée, il la citait à chaque fois, seuls ses amis porto-vecchiais souriaient à son évocation.
J’ai retenu les grandes lignes de son anecdote, je vais la raconter à mon tour et si vous avez connu Antoine, imaginez-le faisant le récit, vous sourirez sans doute bien davantage…
Une fois de plus, je ne suis pas certain de mon écriture en corse, je bricole.

Un gars, encore un amoureux du vélo, raconte :

« Eru in tracia di pidà u me caffè. Era troppu caldu, mi sogu dittu faraghju un tornu in bicicletta, u tempu ch’iddu rinsfrischi. Avanzaiu bè, bè, dà poi un beddu pezzu. Scontru una donna :
O donna ! U Cataraghju hè sempri luntanu ?
U Cataraghjiu ? U ! L’etti francatu di monda !

Sogu vultatu, prestu prestu, u caffè era sempri caldu ! »

C’est l’anecdote que j’ai retenue, je le vois encore, assis en pyjama sur le bord d’un lit et tous les auditeurs assis autour, frissonnant de joie. Nous étions friands de ces récits, c’était notre passe temps favori en attendant le sommeil ou l’injonction du pion pour aller au lit.

C’est à la suite d’une conversation sur FB avec une amie porto-vecchiaise que j’ai eu l’idée d’évoquer notre ami.

Traduction littérale :
J’étais près de prendre mon café. Il était trop chaud, j’ai décidé de faire un tour à vélo en attendant qu’il refroidisse. J’avançais bien, bien, depuis un bon moment. Je rencontre une dame :
Madame ! U Cataraghju est encore loin ?
U Cataraghju . Hou ! vous l’avez déjà dépassé depuis longtemps !
Je suis retourné dare-dare, le café était toujours chaud !

Dans son histoire, l’homme semait le doute entre une plage de Porto-Vecchio et une contrée plus lointaine sur la route de Bastia. Peu importe, une anecdote est racontée pour faire rire et non pour être dans le juste et le vrai.
C’était un petit clin d’œil à la mémoire de notre ami !

L’ambiance était à peu près celle-ci.
Là, il devait s’agir d’un lundi lorsque chacun arrivait avec de quoi se sustenter.
Nous étions plus discrets.

4 Comments

  1. Merci beaucoup pour ce bel hommage sur mon père … j aimerais savoir qui a écrit ce texte .. merci ..

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