Paréidolie.

Un clin d’œil à Gibu, dite Gibulène, qui m’a suggéré de reprendre ce thème. Le texte était sinistré, il suffit de lire le précédent pour comprendre. Je ne reviendrai plus sur l’explication de ces reprises.

 « Une paréidolie est une sorte d’illusion d’optique qui consiste à associer un stimulus visuel informe et ambigu à un élément clair et identifiable, souvent une forme humaine ou animale. »

Hier, je déambulais…

La chasse à la paréidolie est amusante pour un photographe et comme tout safari-photo qui se respecte, le mieux est de se rendre dans son biotope. C’est là que l’on a toutes les chances de tomber sur un lion, un éléphant, comme c’est souvent le cas dans notre région Corse. La paréidolie affectionne les endroits rocheux, c’est dans les domaines granitiques battus par le vent et la pluie que « l’animal » vit. L’esprit déjà orienté et l’œil à l’affût sont deux atouts pour débusquer un spécimen curieux. Avec ces conditions primordiales de recherche, on augmente ses chances d’approche fructueuse.

L’éléphant…
Bien visible ici.

A mon avis, il n’est pas souhaitable d’en abuser. C’est pour cela que je ne pars jamais en traque. C’est au hasard des déambulations que je tombe sur une figure originale plus vraie que nature. J’évite d’en faire une spécialité pour ne pas tomber dans la croyance. Certains, tellement étonnés par les ressemblances suggérées finissent par croire à un signe du ciel ou du Dieu Nature. Alors que les pierres sont là indifférentes à tout, nous lui attribuons une forme et un message. Un martien serait passé devant un visage humain sans s’arrêter et serait tombé en admiration devant une autre forme plus familière pour lui, et que nous n’aurions point remarquée. Une sorte d’anthropomorphisme en ce qui nous concerne et un extraterrestromorphisme pour les créatures venues d’ailleurs.

Avec un peu d’imagination, j’y vois deux visages, des personnages en confidences.
Qu’aurait vu un extraterrestre, s’il en existe ?

Un jour, je randonnais du côté de Bavella, un domaine où les roches sont légion. Un endroit idéal pour trouver un visage humain perdu entre ombre et lumière au cœur de la masse granitique. Je suis tombé nez à nez avec le Manneken-pis dangereusement perché au-dessus d’un à-pic.
Que faisait-il là, à sec, probablement tari par la trouille provoquée par le vertige et le danger qui le guettait de basculer dans le vide ? La ressemblance était frappante, j’étais le seul à l’avoir rencontré sans l’ombre d’un doute. La raison en est toute simple. Pas grand monde ne devait passer là où j’étais à cette heure précise de la matinée, à cette période de l’année. Le soleil, avec l’angle du moment, éclairait son zizi, courbait son dos comme s’il peinait à uriner, penchait sa tête vers le précipice… bref tant de coïncidences s’étaient coalisées que j’avais la quasi-certitude de ne jamais plus tomber sur la même vision. Après quelques clichés (que j’ai perdus lors d’une fausse manœuvre avec mon ordi, on ne voit qu’une partie du cliché), j’ai voulu changer d’angle. Il ne se passait rien de l’autre côté. Je suis revenu au même endroit un quart d’heure plus tard, le soleil avait à peine bougé, mon Manneken-pis avait disparu. A la place trônait un immense rocher informe qui ne ressemblait à rien d’autre qu’un banal rocher. A la vitesse de la lumière, notre petit bonhomme à l’eau facile et intarissable avait regagné Bruxelles, sa ville natale où il vit toujours, incontinent perpétuel.

J’ai perdu le cliché intégral, vous avez une idée.

Je m’amuse beaucoup lorsque je « tombe » sur une paréidolie mais n’en fais jamais un truc mystérieux, c’est comme si j’avais trouvé le bon angle pour photographier un jardin, un bâtiment, une fleur ou un insecte mimétique. Un phénomène naturel, neutre en soi, auquel on donne un sens qu’il n’a pas. Une pierre sans intention qui se trouve remplie de vie par la volonté d’un autre. Une curiosité qui a sa raison d’être toute simple, sans qu’il soit besoin d’y trouver une quelconque extravagance, un quelconque mystère porteur de message. Les messages, je les porte dans ma tête et mon esprit est suffisamment fertile pour m’en inventer tous les jours, non pour m’épater mais pour m’amuser.

Et lorsque j’exagère pour m’amuser, je dis que c’est le rocher de Sisyphe abandonné là, au bord d’un ru.
Cela y ressemble beaucoup, vous ne trouvez pas ?
Ah ! Vous ne l’avez jamais vu ?
Imaginez que c’est celui-ci.

Chacun pense ce qu’il veut, j’aurai toujours ce regard enfantin qui découvre un truc nouveau chaque jour. C’est de la sorte que j’aime me rapprocher, à pas lents, toujours sur les freins, de cet endroit vraiment mystérieux dont personne n’est jamais revenu. Dommage que je ne puisse m’y rendre avec mon vieux Kodak… je vous aurais envoyé quelques clichés. Un vrai scoop en étant le premier sur ce coup… mais je crains que le lieu ne soit rempli de leurres aussi, un vrai Paradis pour les Paréidolies perdues.

La paréidolie se niche partout. J’ai choisi le domaine rocheux pour les besoins du texte.
La fumée, les nuages, les vagues en éclats constituent des supports parfaits pour ce genre de découverte. C’est souvent après coup, directement sur l’image produite qu’on s’en rend compte… Comment voulez-vous savoir qu’il y aura un visage dans cette vague qui vole en éclats ? Cela rend la découverte plus magique et certains n’hésitent pas à crier au génie du photographe alors qu’il n’y était pour rien. Il a juste cliqué en rafale sans savoir ce qu’il en sortira.. Et sans doute, photographiait-il avec une autre intention…
Je ne démystifie rien en disant cela, c’est une réalité mais chacun est libre de s’émerveiller devant ce qu’il imagine être signe d’un ailleurs qui l’interpelle… 😉

En touchant du bois mort (un vieux cerisier) plutôt que rocher, j’y ai vu un gibbon mâle qui cherche à m’effaroucher.
Et vous ?
Et cette sculpture d’un châtaignier sec, n’est pas une paréidolie mais plutôt une allégorie, involontaire, de la cécité causée par grand âge.
Un clin d’œil du lierre qui joue l’envahisseur d’un regard.
🙂
Cette figure qui se trouve à l’entrée (ou la sortie selon le sens du trajet) d’un tunnel,
je l’ai baptisé le « gardien de l’Usciolu ». (Lieu dit)
En plein soleil, moins visible, il semble parti prendre un peu de repos ailleurs.

4 Comments

  1. Petit clin d’œil réceptionné Simonu ! une belle collection que j’adore ! la pareidolie est incontrôlable lorsque nous y sommes réceptifs, mais elle permet du coup de voir ce qui nous entoure différemment et l’évasion est totale ! tes deux, là-haut, discutent d’un peu trop près compte tenu des circonstances 😀 ! ton zizi est extraordinaire (si je peux me permettre 😀 ) mais un personnage dans l’arbre juste face à lui détourne son regard….. il y aurait tant à dire sur chacun de ces clichés…. surtout sur ce vieil inca venu se perdre dans le maquis…. Merci de cet article, bonne journée

  2. Je n’y vois aucun signe, aucun message non plus mais beaucoup de poésie et parfois un peu d’humour dans la nature. J’aime beaucoup cet indien qui semble veiller sur la paix du lieu.

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