Au sortir du Bac philo 2019, je me souviens d’un bac ancien. Je me souviens d’un sujet très bref et plein de ressources : Vous le croyez ? Pourquoi ?
Ce sujet, un bac rempli de belles et bonnes réflexions à qui sait fouiller dans les bouquets fleuris ou prêts à fleurir.
Quel est ce questionnement ? Doit-on comprendre qu’il s’agit d’un « fait » que l’on raconte ou d’une personne qui raconte ? Une personne qui harangue ou qui cherche à séduire ? S’agit-il d’un homme politique, d’un marabout, d’un ecclésiastique qui tous, vous parlent de fiction. Une fiction, une promesse ou simplement une affirmation jamais vérifiée. A-t-il du charisme ? Êtes-vous dans une phase de fragilité pour gober tout ce qui vous arrange ou êtes-vous bouché à l’émeri tout bêtement ? L’obscurantiste est friand de croyances. Il s’en nourrit essentiellement, il est balivernivore. Il ne doute de rien, allez donc le contrarier sur ses persuasions et vous serez bien reçu !
Le propre de la croyance c’est qu’elle ne s’explique pas, c’est ainsi et puis voilà. La poudre de perlimpinpin est magique et la magie c’est du rêve. Le rêve nait spontanément, voyage où il veut, raconte ce qu’il veut et puis c’est tout. Croire est enchanteur, ça repose les méninges, point besoin de réfléchir, de chercher à comprendre, le croire s’impose comme une évidence. C’est commode et on s’en accommode facilement.
Le savoir sécrète le doute. Cheminer par l’interrogation, l’expérimentation, ça prend la tête et ça fatigue. Quand le fait est avéré, expliqué, compris dans toute sa genèse, il n’est plus question de persuasion mais de conviction. Être persuadé est du domaine du croire, être convaincu c’est explicable avec des arguments tangibles, inattaquables. Croire au diable, il suffit de le penser et de le dire, savoir que H2O est la composition de l’eau, n’est pas tombé du ciel, c’est l’aboutissement d’une longue recherche vérifiable à tout instant et en tout lieu. Pour l’heure, le diable et le bon dieu, on ne les cherche pas, on y croit et puis ça va. Tranquille ou pas tranquille, on donne ainsi un sens à sa vie par le plus grand des raccourcis. On fait l’économie d’une recherche sur soi, beaucoup plus longue et difficile, à l’issue incertaine.
La question posée en début de chapitre cache une opposition entre le croire et le savoir. L’un s’explique en regard de l’autre. Un Laurel et Hardy de la philosophie, de la philosovie, de la vie, des choses de la vie.
Un scientifique qui développe un raisonnement, on l’écoute, on le suit dans ses explications, on apprend, on avance, on passe à autre chose sans croiser la croyance. C’est le calme et la sérénité de la pensée. Un bonimenteur cherche à persuader, il développe son raisonnement fallacieux destiné à vous toucher et à vous mettre dans son sac.
Vous l’avez cru ?
Oui !
Pourquoi ?
Parce que c’est lui, parce qu’il m’a séduit !
Le savoir ne séduit point, il révèle le caché, l’ignoré. Il chemine en expliquant le comment des choses et des faits. Le « Pourquoi ? » dans sa connotation métaphysique est inexplicable.
Vous le croyez ? Pourquoi ?
Parce qu’il a rendu « tangible », l’intangible qui trouble mon esprit. Il leurre bien.
Quant à moi, je ne crois rien, je vis et ce que je vis suffit à poursuivre mon chemin.
Ce mulot que l’on voit en illustration, croyez-vous qu’il cherche son chemin, son trou ? Croire ou savoir à chacun sa voie, je ne cherche à convaincre personne.