L’hiver n’est plus très loin. On annonce la neige dans les parages, le temps est plus long. Les matinées semblent interminables à ceux qui ne savent pas paresser au lit.
Le ficateddu est de retour, le tout premier de cette fin d’année, pour moi. Le désir d’habiter le temps m’a donné quelques idées. D’ordinaire, c’est grillade dans la cheminée ou cuit aux lentilles au laurier avec du céleri, et de l’ail écrasé, incorporés en fin de cuisson afin de conserver tous les parfums. Trente minutes de « mijotage » seulement. Tout à l’eau sans le moindre ajout de matière grasse autre que celle de la charcuterie nustrale.
Ce matin, on aurait dit que j’étais au front pour avoir cette idée de cuisine de campagne militaire comme un soldat échoué dans une contrée reculée cherchant un moyen de se sustenter.
Un demi choux vert attendait son heure dans le fond du frigo, c’était suffisant pour tenter une expérience : ficateddu au chou et aux cocos. La recette est simplissime. J’ai poché ma saucisse au foie deux à trois minutes dans l’eau bouillante pour la débarrasser de ses impuretés avant de la tronçonner en quatre morceaux. Dans un faitout légèrement graissé d’huile d’olive, j’ai mis le chou débité en petits morceaux à fondre à feu doux. C’était le moment d’incorporer les bouts de ficateddu sur le lit devenu douillet. Presque aussitôt, sous cloche et sous l’effet de la chaleur, il se mit à juter libérant tous ses parfums dans la marmelade. Le chou, complice, en demandait encore et encore pour s’imprégner de ce fumet si particulier. C’est alors que j’eus l’idée de vider une petite boîte de cocos cuisinés à la graisse d’oie. Les mini-haricots blancs n’ont pas rechigné sous la cuillère en bois. Ils se laissaient pousser, se blottissaient dans le doux molleton en surveillant l’évaporation du jus. Il ne restait plus qu’à attendre midi pour savoir si ce plat réchauffé aura de l’avenir ou pas. J’ai bien aimé et je renouvellerai sans doute l’expérience peut-être avec du salcicettu (saucisse complice du ficateddu).
L’idée des haricots à la graisse, n’est pas sortie du néant. Je me suis souvenu d’un ragout de sanglier, improvisé. Il me restait un morceau plutôt sec et quelques restes d’oie au congélateur. Le mariage des deux me semblait compatible. En faisant sauter les bouts d’oie dans la poêle jusqu’à brunissement, j’ai récolté de la graisse qui m’a permis de rissoler les parts de cochon sauvage. J’ai enchaîné avec la recette classique d’une daube. Une longue cuisson du sanglier avant d’incorporer l’oie qui demande moins de temps pour être fondante. Je vous assure que mon idée surprenante fut appréciée. Un mélange heureux, moelleux et gouteux… Un morceau de sanglier, un autre d’oie, accompagnés d’une polenta de maïs façon pasta asciuta. (Sauce de la daube et vieux fromage râpé ou parmesan)
Mes recettes sauvages et improvisées sont livrées pour mettre l’eau à la bouche sans trop entrer dans les détails des ingrédients. Juste une suggestion, chacun est libre d’imaginer quelques ajouts à sa guise et à son goût. Même avec une description sommaire on sera en mesure de tenter l’aventure sans le moindre risque de s’égarer.
Qui s’embarque a déjà sa petite idée, il ne restera plus qu’à ralentir le voyage qui mène au fond du gosier… Après la « mijote » vient le tour du ravissement des papilles, même avec ce qui peut sembler simple rata de campagne.
Le plaisir est toujours au bout de l’envie.