Il arrive assez souvent lorsque j’évoque le passé, d’entendre dire, passéiste, pessimiste, et finalement, nostalgique.
Je rappelle que la définition de nostalgie commence par « Mal », Mal du pays.
Puis en complément : « Regret mélancolique (d’une chose révolue ou de ce qu’on n’a pas connu) ; désir insatisfait. Avoir la nostalgie de son enfance. »
Bref que des choses pas très réjouissantes.
Pour moi, ce n’est pas cela et souvent même, le contraire.
Si j’évoque mon passé, c’est pour éclairer mon présent, c’est une sorte de jauge qui fait le point sur ma vie actuelle. Un repère qui me permet de mettre le présent en perspective avec le « toujours ».
Il existe ainsi une permanence des choses, une espèce de perpétuité dans la conduite du temps.
Si je fais un parallèle avec la géométrie, je rappelle pour mettre les choses au clair, que le mot éternel correspond à la ligne droite sans début et sans fin, immortel à une demi-droite avec son origine et jamais de fin, perpétuel à un segment de droite qui a un début et une fin.
Nous sommes donc dans le cas de figure d’un segment de droite
Ce que l’on dit nostalgique représente pour moi une perpétuité. C’est un suivi du goût de la vie pour mieux l’apprécier en faisant le point en continu avant la date butoir, avant le point final.
Ainsi mon passé et mon présent se côtoient en permanence, se suivent inlassablement. Le passé talonne le présent, j’en savoure les similitudes et les contrastes.
Sous cet éclairage permanent, j’apprécie ou non les moments qui passent.
Même si le progrès nous a convié très loin, il a aussi convoyé son cortège d’effets pervers très désavantageux pour l’actuel, souvent désagréables.
Hier, à des funérailles, je n’entendais que des « c’était mieux avant ».
Dans notre ville, celui qui arrive ne trouve plus de médecin, disait quelqu’un, les toubibs ne prennent plus de patients. On s’éloigne énormément du serment d’Hippocrate qui invite chaque docteur à venir en aide à celui qui souffre.
Hippocrate est un très vieux personnage de l’Antiquité vers 460 avant JC.
U povaru Zi Hippocrate, dit-on chez nous, est archi dépassé, paix à son âme si elle frétille encore.
Ce n’est qu’un petit exemple, il y en a des tonnes de ce genre.
Pour saluer le progrès, disons que les vieux croutons, largement dépassés, sont largués par les avancées. Comment voulez vous qu’ils sautent de joie au plafond pour déclarer leurs incompétences, leur incapacité à suivre un temps que l’on pense meilleur ?
Laissons disparaître la vieille génération, vive la nouvelle qui échappera au vilain mot.
Nostalgie n’existera plus ? A chacun la sienne, pourtant !
J’imagine mes hiboux qui s’interrogent, le petit jeune demande à son grand-père :
– Missiau, pourquoi « Nostalgie » est un vilain mot ?
– Ben parce qu’on entend « algie » qui signifie douleur, un mal de vivre sans doute, mais je n’en sais rien !
Ne me traitez plus de nostalgique, je vis du moment qui passe, bien ancré dans le présent et pour condiment, pour sel et poivre, pour poudre de piment d’Espelette parfois, j’y ajoute souvent une once ou une large pincée de passé.
Carpe diem.
Vivez du temps qui passe avec le passé !
Le propre de l’homme est le retour sur le passé, bien plus fréquent que le rire…