Etant gosse, je me souviens des petites phrases de morale ou d’instruction civique qui nous attendaient au tableau. Lues et rapidement commentées juste avant le calcul, alors que nous étions encore ensommeillés, surtout l’hiver, elles avaient la particularité de nous réveiller un peu. On se demandait quelle morale allait bien nous sortir le maître ou la maîtresse le lendemain.
Toutes ces petites sentences pleines de bon sens nous ont accompagnés jusqu’à nos tout premiers actes civiques.
Si nous aimions bien cette entrée en matière matinale, rien n’était plus efficace et parlant que les travaux pratiques de la fin d’après-midi.
Nous aussi, nous faisions campagne. J’ai été candidat à une élection de «maire» de la classe. Pas de liste, juste deux candidats, question de clarifier et simplifier les choses. Déjà, durant la campagne, plutôt la tentative de rassemblement des copains et copains des copains, je promettais un goûter mémorable en cas d’élection. Des gâteaux Alsacienne fourrés à l’orange dont nous étions friands tant ils étaient rares chez nous. J’ai été élu pour de faux mais j’ai tenu promesse et mon concurrent malheureux était de la fête. C’était mon ami. En revanche tous ceux qui avaient voté pour lui n’étaient pas du cocktail.
C’est exactement ainsi dans la réalité. Les adversaires directs se rabibochent, les électeurs mal inspirés sont montrés du doigt. Ça doit être une réaction toute naturelle, on ne nous avait rien soufflé.
La préparation à la présidentielle, qui s’annonce déjà, m’a transporté quelques années en arrière… rien n’a changé.
La grande leçon d’instruction civique va se jouer grandeur nature. Les primaires socialistes vont permettre aux citoyens français de se faire la main. Ils vont écouter, juger les coups tordus ou qui paraissent justifiés, se faire une idée et lancer leur bulletin en faveur de leur candidat. Et les petits malins vont peut-être chercher à fausser la « logique ».
Il paraît que Martine et François ont toutes les chances de se trouver au coude à coude sans en jouer, si possible. Ségolène cherchera à se refaire une santé pendant qu’Arnaud et Manuel jaugeront leurs capacités à rassembler, histoire de se tester et d’investir pour 2017. Cette primaire est un véritable terrain d’entraînement pour grands déjà opérationnels et petits qui deviendront grands.
La promesse de ne pas taper sur le copain ou la copine pour ne pas trop affaiblir le gagnant (ou gagnante, c’est pénible de toujours ajouter un féminin pour ne pas réveiller les ronchons) sera-telle tenue ? J’en doute, nous verrons bien.
A droite la promesse d’une primaire n’a pas été tenue. Ce n’est pas bien ! En classe on nous faisait pourtant la leçon. Alors, chacun se singularise et les candidatures se multiplient sans banc d’essai. Le président sortant sera probablement partant pour une nouvelle aventure, Borloo hésite encore mais pas pour longtemps. Peut-être attend-il d’être désiré plus fort. Morin se tâte. De Villepin est courtisé. Boutin y va sans état d’âme en bonne croyante qu’elle est… bref, ça promet quelques bons coups de gourdin.
Marine en rit déjà. Pas trop fort car ils pourraient s’en rendre compte. Elle n’a pas besoin de réviser, elle a déjà ses convictions bien enregistrées de longue date.
Juste à côté, Bayrou continue son cavalier seul, persuadé que son cheval le mènera au poteau cette fois-ci. Il n’y a que la foi qui sauve.
Hulot et Joly ont commencé à ferrailler mais de manière surprenante pour des gens de bonne famille.
Mélanchon a obtenu son ticket, pour l’instant il se repose sur ses lauriers et sera fin prêt dès que les hostilités seront déclarées.
La France est en instruction civique. Mais en regardant de plus près, certains observateurs disent que Boutin va piquer des voix au FN, que Borloo joue pour affaiblir Bayrou… que c’est bourré d’arnaques et de positionnements souterrains en vue des places ministérielles.
Alors, belle leçon de démocratie ou casse-tête chinois ?
On ne sort jamais de l’enfance.