Bien avant le lever du soleil et la montée du mercure dans le thermomètre, la colline est encore endormie.
A peine seulement, car les merles se chamaillent déjà en grattant le sol dans des endroits encore humides après l’arrosage de la veille. Sur le petit chemin qui serpente pour atteindre les planches du bas, des traces de pas encore fraîches trahissent le passage du hérisson. Le bassin est calme, plus une seule rainette à l’horizon.
On n’imagine pas que sous les feuilles des cucurbitacées le priapisme a gagné les courgettes et les concombres pendant la nuit. Juste à côté, les tomates commencent à rougir de plaisir plus que de honte en voyant tout ce monde en érection. Une nature féconde qui fait don de sa satisfaction. La saison maraîchère bat son plein, les midis s’annoncent végétariens sous la tonnelle.
Des tronçons de concombres bien frais, évidés puis remplis de dés de tomates, de poivrons grillés et de basilic, rehaussés d’une vinaigrette légèrement moutardée. Bientôt ce sera la découverte des tomates bleues, je ne connais pas encore leur goût mais j’imagine cette touche céruléenne inhabituelle enrichissant la palette de rouge, de vert et de bordeaux des oignons doux d’une salade de saison. Le soir, les beignets de fleurs de courgettes emmaillotant une pointe d’ail et de basilic, les aubergines blanches farcies à la duxelles* de mon inspiration du jour…
Dans mon coin perdu, loin des luttes banquières, des perpétuelles prises de bec politiciennes, loin des cruautés barbares quotidiennes, il me semble que la vie est plus douce. Je suis presque un Robinson capable de vivre en autarcie. Seuls, mon appareil photo et mon contact blogueur, parfois blagueur, me rappellent que je reste en immersion avec ce monde qui affole. Je pourrais garder mon isolement pour ma solitude mais je me souviens que j’ai vécu longtemps en ville. C’est encore le contraste qui me conduit au plaisir d’être et de donner. J’ai pris cette habitude d’écrire un peu chaque matin pour servir, à qui veut bien visiter mon blog, quelques parcelles d’une vie simple et pourtant si riche de tout. Riche de la nature et des pensées qu’elle engendre.
On annonce un regain de température cet après-midi. Je ne m’en soucie guère, je ne crains ni froid ni chaleur, je m’adapte sans effort. J’irai faire la sieste à l’ombre du grand micocoulier à quelques pas du gîte de la couleuvre verte et jaune de chez nous… Elle sait que je viens là et me contourne lorsqu’elle part en chasse sous la canicule.
*Duxelles s’écrit généralement avec un S au singulier . Il s’agit d’une farce à base de champignons, certains emploient ce terme pour désigner une farce composée de légumes.. C’est le cas pour les aubergines farcies. J’ajoute un œuf et deux ou trois variétés de fromage sec râpé pour rehausser le goût. Pour qu’elles soient moins grasses, je les cuis au four, presque croustillantes, en évitant la friture trop huileuse. Je préfère les manger le lendemain froides et à la croque…on apprécie mieux le détail des saveurs. Une fois blanchies à l’eau bouillante une quinzaine ou vingtaine de minutes, les aubergines sont garnies à votre guise en conservant pour base « les tripes » égouttées.. le reste c’est votre affaire.
La couleuvre verte et jaune n’est pas venimeuse mais il ne faut pas trop lui tenir tête lorsqu’elle se dresse et vous adresse son courroux. Se sentant en danger, elle pourrait bien vous mordre…
Reçus comme un bol d’oxygène, ces mots d’..
« une vie simple,…riche de la nature et des pensées qu’elle engendre. »
Merci, Simon.
Bonjour Claude.
Ce texte a été écrit le matin en remontant du jardin. Je l’ai livré le soir presque en premier jet pour qu’il garde un peu l’aspect sauvage de mon potager à flanc de colline, sente la nepeta sauvage et l’immortelle dont le parfum fouette les environs. Ce n’est pas l’orthodoxie en matière de temps et de structures de phrases… je ne voulais pas revenir sur certains mots qui se sont présentés spontanément. Bonne journée à vous.