Sans aller jusqu’à l’humour noir, je pratique ici, l’humour anthracite qui a le don d’agacer les amateurs de premier degré. Si vous êtes de ceux-là arrêtez illico votre lecture pour éviter de vous prendre la tête.
Il y a toujours un crescendo dans l’apéro lorsqu’il s’éternise.
Cela commence ainsi :
– Oh ! Mi tu es là ? Comment vas-tu ?
– Bien bien et toi ?
– Moi, ça va ça va, il y a longtemps que tu es arrivé ?
– Non, juste deux jours…
– Qu’est ce que tu prends ?
– Heu… Un Casa, tiens !
Les autres sont à la tomate, au perroquet, à la mauresque qui vont rapidement virer au pastis sans ajout de sirop.
Progressivement la discussion va tourner au mélange des interventions, vous risquez de perdre le fil des conversations mais ce n’est pas grave, écoutez plutôt :
– Dis-moi, tu es passé au Ricard ?
– Oui, le Casa et le 51 me donnaient la chiasse et même des hémorroïdes, là je suis tranquille, il descend et il monte à la tête sans autres dégâts, ah ah ah !
Quelques verres plus loin :
– Et Macron…
– Chut ! Pas de politique au comptoir ! Ce sont des choses qui fâchent.
– Et l’autre, le pompier pyromane de LFI, Les Fouteurs d’Incendies…
– Chuuuteux ! J’ai dit pas de politique ! Parle d’autre chose.
– Oui, oui, parle plutôt de Mbappé, il est fort le mec, il tient Paris par la barbichette.
– Moi, si j’étais le PSG, je le mettrai sur le banc et au SMIC, hop !
– T’as pas le droit, et le contrat ? T’es con ou quoi ?
– Je m’en fous des contrats !
– Il fera de la pub.
– Il en fait déjà, plus ils gagnent et plus on leur en donne, c’est con la France, non ?
– Je t’en foutrais moi des footeux qui foutent rien. T’as déjà entendu un joueur dire « Je vais travailler » ? Ils s’amusent du matin au soir et on les paye comme des émirs !
Le tien, le mien, le sien, celui du patron, la température monte.
– Regarde Philippe, il est grand et prend de la hauteur, on dit « du recul »… Regarde, regarde ses postures, il se voit déjà président.
– Qui c’est celui-là ?
– Edouard Philippe l’ancien premier ministre !
– J’ai dit pas de po li ti queux ! Basta ! C’est clair ?
– Alors de quoi on parle ?
– Parle du reste.
– Tiens, je vais parler de Napoléon. La retraite de Russie, ils ont eu de la chance, il neigeait et il neigeait, s’il n’avait pas neigé quelque chose ils auraient pris, une sacrée rouste ! Je te le dis.
– Ah ah ! T’as vu l’autre, il a laissé pousser sa barbe, tu sais pourquoi ?
– Non.
– Il est toujours au bar, c’est pour balayer le comptoir !
– Tu commences à tanguer toi.
– Moi ? Non regarde même sur un pied, tout tremble et rien ne bouge !
Midi a sonné depuis un bon moment, une dame entre dans le bar et voit cette brochette accoudée au comptoir.
– Ah vous êtes beaux, tous, vous feriez mieux de boire avec modération !
– Psitt psitt ! Garçon charge les verres et ajoute celui de Modération, c’est ma tournée !
– Elle est des nôtres, elle va boire son pastis comme les autres… (De concert)
Il est presque treize heures, tous s’égaillent et entrent chez eux à pied. Ils s’arrêteront sans doute en chemin pour pisser et doper les orties… Grand-mère qui a encore bon pied bon œil, les attend de pied ferme à la maison.
Elle ne siffle pas, elle !
Eh bé ! C’est au comptoir qu’on refait le monde, dit-on, c’est peut-être pour ça qu’il tourne toujours, tant bien que mal 😉
J’ai voulu faire un sketch pour changer un peu. 😉