L’imprévu…

Je regardais le paysage, accoudé à un garde-fou.
Les tourterelles roucoulaient sur le pin qui fait face à la terrasse.
Tout était calme.
Sur la route déserte qui conduit à l’immeuble, quelques miettes de pain jonchaient l’asphalte, ça et là, des restes du matin. Le groupe de petits colombidés sédentarisé dans le quartier, se déplace à peine d’un résineux à l’autre, juste pour se dégourdir les ailes. Tout est sur place, inutile de se disperser.

Je regardais une tourterelle nonchalante qui se dandinait, becquetant tout ce qu’elle trouvait sur son passage. Une scène ordinaire, banale, ennuyeuse tant le spectacle était bâclé se résumant à picorage. Le volatile n’était pas là pour se donner en spectacle, je regardais distraitement, sans voir, les idées évadées dans un ailleurs bien plus vivant et chaleureux.

Soudain, un rapace sorti de nulle part s’abattit sur la tourterelle avec la lourdeur d’une pierre tombée du ciel.
Une précision diabolique, un calcul chirurgical pour fondre au bon moment sans laisser la moindre chance au granivore.

Au prime abord, on ne voyait que débris comme les morceau de verres éparpillés d’une vitre brisée. Instantanément, l’oiseau de proie entreprit son œuvre fatale, immobilisant sa proie avec ses serres, et la massacrant de coups de bec crochu. Quelques soubresauts, pas un cri puis ce fut l’immobilité parfaite.
La buse, je présume que c’en était une, sans certitude, a jeté un regard à droite puis à gauche, décolla en rase mottes, s’éleva et disparut derrière les bâtiments emportant son repas dans l’étau griffu de ses serres.

J’ai juste eu le temps d’attraper mon petit compact de poche pour prendre quelques clichés médiocres, dans la précipitation et la frénésie du moment. J’ignorais si j’avais le temps de focaliser et de cadrer correctement…
J’avais l’essentiel, l’image d’un instant imprévu et de l’improbable scène que je n’aurais jamais imaginée à cet endroit.