Les volcans s’endorment tard…

Etre un volcan vieillissant dont le feu couve toujours dans ses entrailles et la lave surgit encore, brûlante, poussant très fort sur les parois de la cheminée avant de jaillir dans le ciel bleu, est signe puissant de vie. Cette force qui s’offre des foucades anime qui aime profondément cultiver les émotions.
Puis surviennent le calme et la paix du corps, la paix de l’esprit en attendant la nouvelle éruption.

D’éruption en éruption, le corps exulte. Il a l’habitude du feu et de la braise.
Mi sauvage, mi apprivoisé, il ne frémit pas tout seul.
Tous les sens s’unissent pour voyager avec l’autre.
Doux, bienveillant, attentif, il apprivoise, engage à l’abandon confiant, l’autre s’oublie et donne.
Tour à tour, il devient le temps. Le temps mort, le temps lent, le temps qui attend, qui guette et s’accélère… le temps qui s’envole puis s’endort, très tard, se suspend, savoure l’arrière-goût rétrospectif… Comme un besoin de revivre au ralenti, au ressenti, au réfléchi, toutes ces secousses chavirantes, débridées, passées trop vite avec la bombe volcanique qui accélère le voyage de la chambre magmatique à la fontaine de lave.

Du bout des orteils jusqu’aux tempes, il n’est plus que frémissements, frissons, tremblements… un parcours fréquenté par des doigts agiles, légers, appuyés, sans jamais être pressés d’aller là-bas. Une paume qui enveloppe la nuque et frictionne les épaules, masse le dos et le bassin. Un long voyage à travers creux et rondeurs, forêts et plages glabres. Il n’entend plus que le souffle haletant, d’abord naissant puis qui s’anime dans un crescendo saccadé et rageur.

L’autre bascule, prend le pouvoir. Elle devient volcan à son tour. Elle aussi a sa lave qui coule lorsque son cratère se fait brûlant. Le feu lui monte à la tête, c’est elle qui secoue, appelle, tourbillonne, « girandole »* du bassin, demande, prend et donne tout. Tout, jusqu’à l’offrande mutuelle des deux volcans qui s’apaisent puis s’éteignent. Un poids mort s’affale sur vous devient dernière offrande aussi, abandon total.
Le don absolu de la confiance et de l’amour.

Quand le volcan sera définitivement éteint, il y a parait-il, de quoi cultiver un autre jardin sur ses pentes endormies et ses friches fécondes. Ce jardinier-là, n’aura plus que la tendresse pour cultiver le passé en se méfiant du futur qui lui prépare un dernier mauvais tour.  

Je préfère ce volcan fou de rage qui envoie ses étoiles, jette tous ses feux dans une gerbe de soubresauts, de fête incandescente puis laisse ses cendres encore chaudes au souvenir de l’autre.
Je n’aurai rien à cultiver dans ma morne plaine recouverte de mes scories.

Je voyage. Du froid au torride, de la paix au paroxysme, du suffisant au trop, du vide au débordement, du calme à la tempête, prenant en pleine face toutes les débris de la pyrotechnie…
Je voyage dans les choses de la vie… 

Il n’y a de regrets et de grandes émotions que du bris des choses puissantes et si fragiles.

*Ce verbe n’existe pas, il a été inventé pour la circonstance et signifierait : tourner de tous ses feux autour d’un axe. (Pyrotechnie)

6 Comments

  1. Fouffff ! Fait chaud chez vous ! 🙂
    Très beau texte, la passion et la poésie réunies et de somptueuses images.

  2. Bonsoir Simonu,
    Non, n’ayez pas peur, je ne suis pas une revenante ! 😉
    Il y a cependant longtemps que je ne suis venue « lire votre langue corse » aussi chaude que ce volcan que vous évoquez avec un enthousiasme… « chat-l’heureux ».
    Merci d’avoir ouvert les vannes. 🙂
    A bientôt.
    Cat

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