Qui sont ces fantômes qui souffrent sur nos têtes ?

Nathalie Rheims vient de pondre un article à la suite de l’émission « On n’est pas couché » dans lequel, elle promet un beau succès au dernier livre de Patricia Darré  qui dialogue avec l’au-delà.

J’ai trouvé sa démarche très curieuse.

Patricia Darré « dialogue tout naturellement avec les disparus » dit-elle. Elle explique que la dame craignant une dépression, avait consulté un psy qu’elle dit médecin ensuite, et que ce praticien averti, ne trouva rien d’anormal, qu’aucune explication scientifique n’apparaissait pour ce curieux phénomène.

Avec cette non démonstration, ou démonstration de rien du tout, elle en fait quasiment une certitude : Patricia est bien en contact avec les esprits. Pour donner encore plus de poids à ses assertions, elle fait un voyage historique de la notion à travers Homère, Montaigne ou Proust, c’est-à-dire des fantômes de preuves aussi. De fantômes en ectoplasmes, elle s’envole au-dessus de nos têtes pour assurer que « certains esprits ne parviennent pas à admettre qu’ils sont morts ». Et tout cela affirmé le plus simplement et sûrement du monde.

Il est de bon ton de déclarer que tout ne tombe pas sous le dictat de la logique cartésienne, qu’il existe aussi des phénomènes qui échappent à la science. Certes, la connaissance n’est pas encore arrivée jusque-là et le jour où elle y parviendra, on y trouvera une logique malgré tout. Pour l’heure, ce sont le flou et l’inconnu qui enfument notre imaginaire. Je me souviens d’une enseignante (ce sera ma digression du jour) déclarant qu’un enfant faisait des soustractions totalement abracadabrantes sans aucune trace de bon sens visible. En regardant de plus près, je me suis rendu compte qu’il existait bien une logique personnelle. L’enfant mélangeait addition et soustraction de manière curieuse et cela résultait d’une mauvaise assimilation de la méthode de la classe. Au lieu de pratiquer la soustraction vraie, « je prends 6 et j’enlève 2 » l’enseignante avait, d’emblée, appliqué la méthode du complément soit « je pars de 2 pour aller à 6 ». La confusion entre addition et soustraction pendait au nez des plus distraits ou des plus réfractaires. Il fallait d’abord, pour ces enfants, pratiquer la notion soustractive avant de passer à celle de la recherche du complément qui n’est qu’une commodité de calcul.

Il en sera de même pour ces histoires de communication avec les esprits. On occulte le fait que cela puisse venir du cerveau de la personne vivante essentiellement. Que son inconscient ou un fonctionnement particulier de ses neurones la conduise sur des voies qui ne sont pas ordinaires. On imagine toujours que c’est le mort qui se présente au vivant et rarement l’inverse. Il est courant d’entendre dire qu’une personne décédée est venue hanter les rêves alors que probablement c’est l’inconscient qui a réveillé un souvenir. C’est nettement plus amusant, plus intrigant aussi, lorsqu’il s’agit d’une publication.

Malgré cette esquisse d’hypothèses, je ne sais strictement rien de ce qui se passe dans ce domaine. Je ne suis ni pour ni contre. Je suis sceptique, prudent et mesuré. Je sais que je ne sais pas. Puisque je n’y comprends rien, je ne me hasarderai pas à donner une explication au phénomène. J’attends que la lumière soit faite en espérant avoir le temps de vivre jusque-là.

Une chose m’interpelle cependant. Pourquoi ces manifestations, sont-elles toujours mystérieuses, jamais claires et franches ? Pourquoi se produisent-elles dans des circonstances qui surprennent ? Pourquoi ces esprits qui auraient un pouvoir, resteraient-ils dans le secret. Pour mieux entretenir le flou dans l’entendement des vivants ?

Moi décédé, je saurai ce qui se passe et si j’en ai l’opportunité, je ferai tout pour me manifester clairement… Moi décédé, je me ferai reconnaître, ne vous étonnez pas si un soir vous sentez une présence. Moi décédé, Je vous tapoterai l’épaule en présence d’autres personnes et si je peux émettre un son, je m’exprimerai à haute et intelligible voix. Moi décédé, je briserai le mystère… Non mais ! Y-en marre de ces cachoteries !

Une chose me parait certaine, Nathalie Rheims promet un beau succès au livre de Patricia Darré qui vient de sortir : Les lumières de l’invisible. Elle n’avait pas besoin de préciser que l’éditeur Michel Lafon « est connu pour son flair et son sens du public », ni d’appuyer avec Alexandre Adler « dont le sérieux témoigne de  l’authenticité de l’expérience de cette femme lumineuse »… Ce spécialiste des relations internationales serait-il passé aux relations avec l’outre-tombe ? Il n’est, en l’occurrence, pas plus spécialiste que le commun des mortels tout comme le pape ne détient la certitude de l’existence de Dieu. Sa critique favorable  et bienveillante suffira largement pour assurer une bonne vente à ce deuxième volet, en attendant le troisième si quelques esprits se rebellent pour avoir été trahis dans leur confiance. Dans ces cas, généralement, l’appétit venant, on pousse jusqu’au triptyque. 

Je suis aussi en communication avec l’au-delà. Mes fantômes souhaitent garder l’anonymat. Je ne dirai rien de leur identité, je voulais juste faire savoir que les discrets existent aussi. Ils sont restés après la mort ce qu’ils étaient de leur vivant.

Si certains défunts ne parviennent pas à admettre qu’ils sont morts, eh bien, qu’ils se manifestent, nous ne demandons qu’à les écouter, il ne faut pas se prendre la tête tout seul… et puis comme ça, nous pourrions instaurer une autre démocratie entre l’ici et l’au-delà.

Ce n’est pas gagné d’avance… entretenir le mystère est tellement plus captivant…

 

 

 

En attendant, avouez que « Les lumières de l’invisible » est un titre sacrément bien choisi pour la réclame… Cela crève les yeux. Je suggère pour finir le triptyque : « Ces voix qui choisissent une autre voie ».

 

7 Comments

  1. Bonjour et merci Boileau.
    Vous aimez visiblement les figures de style, et je pense que vous avez dû réaliser ici, un lapsus calami en parlant d’apocope. Il s’agit d’une anaphore, la répétition du même mot en début de phrase… probablement le fantôme de François Hollande qui me soufflait : « Moi président…Moi président…. » Cela aura servi au moins à ça. Nous partageons ce plaisir des figures de style, si cela pouvait en entraîner d’autres dans le sillage…. Bonne journée

  2. Bonsoir,

    Un grand mérite du phénomène Patricia Darré est de mettre dans la culture, comme dirait Cyrulnik, qu’il existe des « réalités non ordinaires ».
    Peut-être la science l’aurait-elle déjà prouvé? A quoi bon, les gens vivent comme si la Terre était au centre de l’Univers, malgré la découverte de Copernic…du 16éme siècle.

    Je vous cite: « Il est de bon ton de déclarer que tout ne tombe pas sous le dictat de la logique cartésienne, qu’il existe aussi des phénomènes qui échappent à la science. Certes, la connaissance n’est pas encore arrivée jusque-là et le jour où elle y parviendra, on y trouvera une logique malgré tout. »
    Ça sent la toute-puissance ne trouvez-vous pas, et ça me fait peur. Rien au-dessus de l’humain et son mental.

    Pourtant depuis quelques années, dans mon sommeil je rencontre des guides. Comme vous, j’ai d’abord pensé que cela pouvait venir de profondeurs inconscientes…une sagesse cachée? mais « ils » se sont plaint de leur « manque de notoriété », puis « ils » m’expliquent que cette guidance « est un art de vie, mais ce n’est pas la vie ».
    J’ai beau essayer dans tous les sens, la grille de lecture psy ne colle plus à ce niveau.
    Et il y a ce guide different des autres, plus grand, quelquechose de noble et equanime, pas d’ailes dans le dos mais le mot « ange » lui va très bien…peut-etre est-ce cet « être de lumiere » dont parle les expérienceurs de NDE. Une hallucination? non, « ça » existe, « ça » intervient de façon très sensée, « c’est » là pour prévenir, pour guider…rien à voir avec une hallu. Il n’y a pas de paroles échangées avec lui, contrairement aux autres guides, il y a vraiment une différence.

    Comme pour Patricia c’est venu sans que je m’en doute. Peut-être parce que je demandais intensément de l’aide intérieurement à une époque, ça m’a « branché » sur cette guidance.

    Je pourrai aussi évoquer cette sortie hors du corps en pratiquant un sport, j’ai en mémoire l’image de cette petite voile sur la mer en dessous de moi, mais surtout cette sensation d’espace vibrant très fortement, une vibration de pur « être », il n’y a plus de limites corporelles, pourtant j’y suis toujours « moi ».
    Alors depuis cette expérience, le cerveau qui sécrèterait la conscience comme le foie la bile: non merci.
    Mais le concept de « délocalisation de la conscience »: ah oui, ça colle.
    Un peu étrange: au quotidien nous sommes dans ce « tube à essai » corporel, quand même pratique pour faire des expériences, se frotter au monde et aux autres, c’est comme un énorme zoom de notre « être ».

    La culture évolue. Des gens font leur « coming-out », les sceptiques sont moins virulents ou essayent d’être plus constructifs. Tant mieux? Bien sur qu’on a grand besoin de la « raison » pour ne pas partir en vrille, si c’est un mot dans lequel on met aussi sagesse, discernement, respect, humilité, là d’accord, vive la raison.
    Mais la raison-mental arrogante, triomphante, un certain discours scientifique aux accents stalinien…ça doit s’arrêter.

    Cordialement

  3. Bonjour Flo
    Mon point de vue n’est qu’une réaction amusée à l’article de Nathalie Rheims. Il n’y a aucun dictat stalinien dans mes propos si je suis visé à travers une tendance cartésienne.
    Patricia Darré et Nathalie Rheims cherchent un appui scientifique, l’une en prenant l’avis d’un médecin et l’autre déclarant, à la lumière de cet avis, qu’il n’y a rien d’anormal. Vous-même parlez de révolution copernicienne qui est aussi une approche scientifique en mouvement. Avec l’épistémologie la science a ses garde-fous. Ce n’est pas le cas de la voyance et des médiums qui n’ont pas cet équivalent.
    Un évènement récent, l’affaire des séquestrées de Cleveland donne un exemple frappant des dérives possibles. La célèbre voyante américaine Sylvie Browne déclarait un an après la disparition qu’une enfant était morte. Elle disait exactement : « Elle n’est pas vivante. J’espère me tromper pour votre fille, j’espère que je me trompe ». Peut-être s’agit-il d’une imposture comme il en existe partout.
    Communiquer avec l’au-delà n’a rien à voir avec une quelconque décentration ou sortie d’égocentrisme. Les « esprits » qui communiquent viennent d’ici-bas et non d’un monde mystérieux, il n’y a rien de copernicien non plus.
    Je serais très heureux que l’on fasse la lumière un jour, que l’on sorte de l’obscurité qui permet d’y cultiver le mystère. Dire que les esprits cherchent à rester secrets est un postulat qui autorise toutes les dérives. Communiquer en catimini avec les esprits est un retour à l’égocentrisme bien plus qu’une libération du carcan cartésien.
    La science permet à l’homme de vivre plus longtemps, les recherches avancent sur le cerveau notamment.
    Je doute en espérant, comme le disait la voyante américaine, me tromper. En attendant, je vis dans la lumière et suis totalement inadapté à la vie dans l’obscurité. Si la réalité des médiums est avérée elle deviendra lumière un jour ou restera suspecte avec pour défense : pourquoi faut-il toujours de la lumière et pourquoi ne pas supporter la part d’ombre ? Oui, pourquoi pas ?
    Mon univers est modeste. Celui d’un être qui vit constamment avec un point d’interrogation au-dessus de sa tête et n’a rien d’une toute puissance… Cette dernière se trouve plutôt du côté de celui qui se déclare capable de communiquer avec ce « qui est au-dessus de l’humain et de son mental ». La culture évolue pour aller vers la lumière et ne plus être l’apanage de quelques initiés.
    Cordialement.

  4. Pardon je ne voulais pas vous viser, mais il est vrai que j’ai tendance à sortir mes gants de boxe quand on met en doute certains vécus.
    Sylvia Brown et quelques autres me font penser à ces bandits légendaires de l’Amérique, peut-être que ce pays aime ce genre de personnage, faciles à débusquer pourtant vu leur gros appétit pour l’argent.

    J’ai la chance d’avoir découvert une boussole « merveilleuse », mais est-ce vraiment réservé à des initiés, ou n’est-ce pas plutôt les gens qui freinent des quatres fers face à des perceptions étranges, un processus d’ouverture un peu trop vaste, un peu trop « en dehors des clous »?
    Est-ce que cela a la moindre place dans notre monde moderne ou tout doit avoir une explication carrée? à part celle sulfureuse, tournée en ridicule, et c’est vrai inutilement ésotérique parfois…pas vraiment engageant pour quelqu’un de sensé.
    Alors il faut attendre un évènement qui va laminer la personne pour forcer son ouverture, que ce choc soit heureux ou malheureux. Dénucléation temporaire de l’ego, où toutes les références vacillent.
    Evenement fort qui donne l’impression d’une « initiation », qui pourrait tout aussi bien arriver en douceur, si on lui permettait. Mais quel discours empêche, qui met de l’ombre, qui dit que ça n’existe pas?

    Il y a aussi cette grande peur de l’humain de la folie plus encore que de la mort, convenez qu’il n’y a personne pour accompagner les gens vers ce genre de « réalités non ordinaires », il semble que chacun doivent se débrouiller, acheter trois livres, écouter madame Darré à la radio…
    Ça rend l’aventure dangereuse, d’un pied dans chaque monde on peut glisser vers la psychose, ou la toute-puissance effectivemment de se croire un demi-dieu, un élu.
    S’il y a une puissance que j’ai envie de connaître, c’est celle des limites comme dirait Christiane Singer, et cette guidance rencontrée prend parfois le visage d’un être fantastique très sévère (sévère et nécessaire) qui me met « fissa » dans mes petits souliers.

    Bon après-midi !

  5. Opposer argument contre argument n’est productif que si l’on discoure avec la même logique. Lorsque le « A est A » s’affronte avec le « A peut-être aussi non A » cela donne lieu à un discours de sourds en toute stérilité.

    Le plus important est que vous ayez trouvé une boussole pour votre équilibre personnel.

    Pour ma part, je ne ressens aucun besoin « d’énucléer temporairement mon égo », je ne sens pas mes « références vaciller ». Je suis serein, en toute quiétude et aucun mouvement venu d’un extérieur inconnu ne m’interpelle pour l’heure.

    Je respecte votre vécu, il semble inutile de poursuivre sur cette voie de la persuasion de l’autre. Je crois que nous nous sommes compris et que tout est clair dans nos esprits. Là est l’essentiel.

    Je vous remercie pour cette rencontre sur un texte perdu dans un blog quasiment confidentiel.

    Je vous souhaite également une bonne après-midi.

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